INTERNET-TRIBUNE-LIBRE



mercredi 19 février 2025


Navigation

Accueil général * Choix archives * Site littéraire * Archives 2025 * Nouvelles publications * stats économiques au monde


Sommaire

Article 1 : L’EUROPE FACE À TRUMP ET POUTINE

par Jean-Jacques REY

Article 2 : LÀ-BAS EN ISRAËL

par Yaressua DNOMYAR

Article 3 : STATISTIQUES EFFROYABLES CONCERNANT L'ENFER DE GAZA

par Mazin QUMSIYEH

Article 4 : FIASCO MORAL, QUID DE LA PAIX EN PALESTINE ?

par Dominique SOPO

Article 5 : POUR LE GROENLAND ET CONTRE TRUMP

par Hajar DRISSI



Article 1





Image de silhouette hésitant devant étoiles de l'Europe.

Image allégorique de l'impérialisme belliqueux des USA.


L’EUROPE FACE À TRUMP ET POUTINE
 
 
 

   Entre Trump et Poutine, nous sommes bien coincés, nous autres, les Européens, et pour se sortir de ce tracas géopolitique, il ne faut pas trop compter sur nos décideurs du moment (quoique que certain-e-s commencent à se bouger) ; car la plupart d’entre eux sont issus des classes bourgeoises, dominantes économiquement parlant, mais traditionnelles féales de la Finance internationale, celle-là qui détermine en sous-main l’ordre établi par les Puissances étatiques ; et ; ils ont trop peur de compromettre au final leurs intérêts de classe et donc leur confort (spirituel ou matériel) et leurs avantages… Le sentiment patriotique vient après !
   Le réveil sera dur, n’en doutons pas, et les néolibéraux qui veulent influer en politique, recrutés en grande partie dans cette bourgeoisie transnationale, sont mis devant leurs contradictions et responsabilités.

   Entre la Chine et les USA, nous (l’Europe) sommes même devenus une « colonie numérique », espionnée de tout bord et avec une souveraineté très symbolique à ce sujet… !
Comme si les ordinateurs avec leur parc de logiciels et maintenant les Smartphones ne suffisaient pas à notre aliénation, nos infrastructures dont les câbles sous-marins de télécommunications n’ont plus de secrets, autant pour nos « amis » que nos ennemis. Nous ne maîtrisons pas grand-chose en vérité, triste sort !
   Inadaptation et manipulation sont les deux faces d’une même médaille, dans n’importe quel domaine, c’est particulièrement vrai dans les nouvelles technologies.

   Ainsi donc Trump nous prend pour des billes tandis que d’autres nous prennent pour des carpettes, et ils n’ont pas vraiment tort en y pensant bien, même si quelques relents fascisants se dégagent de ces piètres considérations…

   Il y en a qui aiment bien les sujets qui effrayent et en font tout un cinéma, je ne sais pas si vous l’avez remarqué…
   Trump s’amuse à jeter des « boules puantes » tout azimut et obtient autant de cris d’orfraie qu’il veut. Les habituels lécheurs de bottes et perroquets, dans les médias grand public, lui font une publicité d’enfer lorsqu’il débite ses sornettes, pourquoi se gênerait-il ?
   Hélas ! Trump n’est que le reflet de l’opinion majoritaire dans son peuple qui l’a élu de manière réactive, il faut le dire. Il est son « champion » en quelque sorte contre le déclin de « l’empire », et il a été propulsé en conséquence en haut de la pyramide sociale ; ceci avec quelques illuminés de son choix qui ont des visions autant abracadabrantes que restrictives, mises en scène aux fins d'intimidation. Nous pouvons en déduire qu’il s’agit manifestement de volontés impérialistes, exprimées sans ambages, et un danger pour la Paix, s'agissant du monde entier.

   Nous devons, nous en Europe, être prêts à une guerre commerciale et même une guerre tout court, contre les impérialismes de tout bord qui dansent autour de nous. Ceux qui mènent ces politiques agressives, complètement dénuées de scrupules, ne connaissent que le langage de la force. Ils sont même constamment dans la surenchère et la fuite en avant à ce sujet… Ce n’est pas parce que Trump ou Poutine veulent jouer les terreurs et dominer dans le monde, que nous devons faire profil bas et éluder les difficultés. Cela ne fera pas disparaître les menaces. Nous sommes des « gibiers » de premier choix !
   N’oublions pas qu’un État n’a pas d’amis, mais que des intérêts à préserver au mieux, sans parler des sempiternelles faiblesses humaines comme la mégalomanie et l’avidité.
   Et je considère maintenant que nous devons nous défier autant des Étasuniens (USA) que des Russes, et ce n'est pas les Canadiens ou les Mexicains, placés aux premières loges pour subir des inconvenances, qui auront majoritairement un avis très différent... !

  
Le « gros dégueulasse » Trump n’est qu’un avatar de son temps qui reprend les mêmes motivations qu’aux origines de l’humanité : au moins à partir de l’homme de Cro-Magnon ! S’il y a eu des progrès depuis, en psychologie, ils sont minimes. Bien que membre de l'oligarchie étasunienne, Trump est plutôt à considérer comme un rustre, ultraconservateur et vindicatif, qui a été mis en position de puissance démesurée et prodigue de mauvaise foi. Je pense bien qu’il se fiche éperdument de l’état du monde après lui. Lui et son compère Netanyahou par exemple n’ont rien à envier aux terroristes et criminels qu’ils dénoncent à longueur de temps, particulièrement quand ceux-ci nuisent directement à leurs intérêts, personnels ou autres, et là-dedans, on peut y mettre dès lors les organisations humanitaires ou la Justice internationale : sacré tableau de chasse !
   Ces types de dirigeants, malfaisants en diable pour une majorité de terriens, sont une véritable plaie pour l’humanité, et ils rappellent de bien mauvais génies du Mal… Sans aucun doute, ils finiront en mauvaise posture, tous les deux.

   Donner tout le pouvoir ou un pouvoir exorbitant sur la vie des gens à un seul être humain, c’est dangereux depuis toujours. Cela mène à d’incroyables dérives et des extravagances.
   Misérablement, nombre de personnes ont besoin de chefs et d’autorités pour marcher « droit » dans la vie, mais c’est en fait qu’ils sont tordus dans leur esprit et incapables de se prendre en charge tout seul. Ils ont besoin de béquilles mentales pour pallier un manque d’autonomie ! Donc ils sont prompts à se décharger de leurs responsabilités sur d’autres et ils se rangent naturellement du côté le plus fort ou de celui qui a le plus d’ascendant. C’est comme cela qu’on a eu Alexandre le Grand ou Napoléon (entres autres évidemment) et que maintenant, nous avons Trump ou Poutine : vogue, la galère !  






- En neuf articles -
La rivalité et l'exploitation inconsidérée des ressources naturelles accroît les risques d'une crise globale





_______________________________________________


Semi-conducteurs : chaînes de valeur et liens de codépendance (parties 1 et 2)
Par  Jonathan Bonjean ; 9 janvier 2025

les-yeux-du-monde.fr/mondialisation-enjeux/55123-semi-conducteurs-chaines-de-valeur-et-liens-de-codependance-1-2

les-yeux-du-monde.fr/actualites-analysees/asie-oceanie/chine/55218-semi-conducteurs-codependance-guerre-commerciale-2-2

[*Jonathan Bonjean : analyste et auteur, ancien professeur d'histoire en reconversion, inscrit à IRIS Sup en analyse stratégie internationale, parcours sécurité, défense et gestion de crise. Il pratique le mandarin et travaille sur les politiques étrangères chinoise et turque ; il s'intéresse en particulier à la géopolitique des connectivités et des conflits dans l'espace eurasiatique. Il est aussi co-auteur d'un manifeste intitulé "Manifeste pour une plateforme emploi‑logement", publié dans la Revue Quart Monde. Par ce biais, son travail aborde ainsi des questions sociales et économiques, contemporaines, cherchant à repenser les modes d'action pour améliorer les conditions de vie.]

Le 3 décembre dernier, He Yadong, porte-parole du ministère du commerce chinois annonçait l’interdiction des exportations vers les États-Unis de gallium, germanium, antimoine et graphite pour des raisons de « sécurité nationale ». Ces restrictions peuvent s’interpréter comme une réponse aux nombreux contrôles à l’exportation imposés par les États-Unis vers la République populaire de Chine, tels que le Chips and Science Act, voté par le Congrès américain à l’automne 2022, et plus spécifiquement comme un coup rendu aux dernières mesures annoncées la veille par le Bureau of Industry and Security. Celles-ci visaient à étendre les restrictions imposées aux importations chinoises à 24 nouveaux composants nécessaires à la fabrication des semi-conducteurs ainsi que certains logiciels utilisés pour concevoir ces nouvelles ressources de la puissance.

Les semi-conducteurs, nouvelle ressource de la puissance
Indispensables par exemple à l’entraînement des intelligences artificielles et de manière générale, condition de la supériorité dans le domaine de la technologie de pointe d’usage civil ou militaire, les semi-conducteurs constituent un des derniers maillons d’une chaîne de valeur sur lequel les États-Unis possèdent à ce jour un avantage de taille. Celui-ci réside dans le savoir-faire d’entreprises en situation de quasi-monopole dans le domaine de la conception ou de la fabrication de ces puces, telles que Nvidia ou la taiwanaise TSMC, qui possèdent l’une et l’autre des usines sur le territoire américain, et sont soumises à la législation américaine. Or le gallium et l’antimoine sont nécessaires à la fabrication de ces mêmes semi-conducteurs.
Dans cette compétition, la Chine a pour atout un contrôle presque exclusif de la production mondiale du gallium, près de 90 %, et assure 40 % de la production d’antimoine. Si les États-Unis possèdent vraisemblablement des stocks de réserves pour ces ressources, celles-ci demeurent limitées.
Quant à l’Union européenne (UE), moins prudente que les États-Unis, elle est encore plus vulnérable à ce type de mesures de rétorsion, inhérentes, selon David Baverez, à l’avènement d’un cycle « d’économie de guerre », du fait de l’absence de véritable politique de stockage de ces matériaux stratégiques.

La relation de codépendance, nœud des dénis chinois et américains
Dans un livre publié à l’automne 2022, Stephen S. Roach, professeur à Yale et ancien dirigeant de la banque Morgan Stanley Asie, employait les méthodes de l’économie comportementale afin de caractériser la forme pathologique devenue propre à la relation sino-américaine. Avec la finesse d’un observateur averti du monde chinois et la probité d’un diagnosticien conscient de sa partialité, il apporte une vision plus nuancée de cette question que certains de ses prédécesseurs.
Selon Roach, les faiblesses chinoises et américaines participent de la même maladie, piégeant l’une et l’autre dans une relation destructrice de codépendance. La population des États-Unis semble en effet intoxiquée par le besoin de consommation sans avoir les moyens de cette consommation, tout particulièrement depuis le deuxième choc pétrolier, survenu un an après « les réformes et l’ouverture » de Deng Xiaoping, en 1978. Celles-ci agirent à la fois comme remède et poison pour l’Amérique. La classe moyenne américaine a pu entretenir l’illusion de son enrichissement en consommant notamment les produits chinois bon marché, alors que la part de l’épargne américaine diminuait, ne représentant plus que 3,2 % du produit intérieur brut (PIB) en 2021, quand ce taux s’élevait en Chine entre 20 et 30 %.
À l’inverse, si de nombreux Chinois sont sortis de la pauvreté, il existe en Chine une mémoire de la misère et une large part de la population demeure inquiète face à l’avenir. Les réformes des entreprises d’État des années 1990 et le démantèlement du « bol de fer » ont en effet limité les garanties publiques en matière de protection sociale. Plus récemment, la politique zéro-COVID a largement réactivé ce réflexe de manque de confiance vis-à-vis de l’avenir et des risques socio-économiques.

Agressivité et impuissance: une opportunité pour les pays d’Asie du Sud-Est ?
Cette codépendance économique est aujourd’hui devenue politique et psychologique, les élites politiques américaine et chinoise s’attribuant réciproquement les raisons de leur vulnérabilité dans une même logique de déni de leurs impuissances respectives. La guerre des semi-conducteurs cristallise aujourd’hui cette escalade augmentant les probabilités du conflit accidentel. Suite à sa réélection, Donald Trump a nommé Jamieson Greer, faucon de la guerre commerciale, au poste de Représentant au commerce. Alors que de nombreux industriels présents en Chine délocalisent leurs activités en Asie du Sud-Est par crainte de l’augmentation des tarifs douaniers, le rôle politique des pays de l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) impliqués dans ces mouvements centrifuges ne peut désormais que s’accroître entre les deux géants.

Les liens de codépendance sino-américains seraient-ils rompus grâce au phénomène DeepSeek? Les spectaculaires conséquences boursières des performances du chatbot chinois ont en tout cas devancé l’annonce des 10 % de droits de douane frappant les produits chinois dans le cadre de la nouvelle « guerre commerciale » menée par Donald Trump.
.../...
DeepSeek ou l’effroi de Wall Street
Dans les jours qui suivirent « le bain de sang » boursier du 28 janvier 2025, induit par la présentation des performances de l’intelligence artificielle (IA) générative chinoise DeepSeek, les valorisations des géants de la tech américaine se sont timidement redressées. Sans remettre en cause la rupture induite par DeepSeek, réputée capable de rivaliser avec Chat GPT à bien moindre coût, trois facteurs doivent néanmoins mettre DeepSeek en perspective.
Tout d’abord, DeepSeek demeure soumis à la censure du Parti communiste chinois (PCC). Ensuite, la modestie supposée des ressources requises pour le développement de DeepSeek présente le visage séduisant d’une IA sobre, et plus efficiente que ses rivaux américains. Cette apparence ne peut que ravir l’éthique promue par le principe de  « circulation duale » mis en avant par Xi Jinping depuis 2020. Ce concept rejette l’idée d’un modèle de croissance centré sur la seule consommation intérieure. Néanmoins, cette IA, conforme aux vertus de l’idéal maoïste, n’est pas affranchie de la technologie Nvidia. Le fonds d’investissement High Flyer, propriétaire de DeepSeek, anticipant les restrictions du Chips and science act d’août 2022, aurait acquis près de 10 000 semi-conducteurs A100 ainsi que des puces H100 produites par Nvidia au cours de l’année 2021, et peut-être également par des biais moins avouables. Enfin, il convient de signaler la méfiance profonde du PCC vis-à-vis du secteur de la finance, et à plus forte raison envers ce type d’acteurs basant ses conseils d’investissements sur des algorithmes.
Faut-il voir dans ce surgissement de DeepSeek un effet de bluff destiné à préparer les négociations avec Donald Trump ? Si on ne s’affranchit pas par magie d’une relation d’interdépendance profondément ancrée, il convient peut-être ici de retenir que la performance d’une innovation chinoise est désormais capable de déstabiliser Wall Street. .../...


_______________________________________________


La guerre des ressources en mer de Chine méridionale
13 septembre 2023. Par Joshua Frank

alencontre.org/ameriques/americnord/usa/la-guerre-des-ressources-en-mer-de-chine-meridionale.html

[*Joshua Frank : est un auteur et journaliste d'investigation, basé en Californie,  par ailleurs co-éditeur du magazine politique alternatif  "CounterPunch". Il a écrit "Atomic Days: The Untold Story of the Most Toxic Place in America" (Haymarket Books, octobre 2022). Son travail couvre des sujets politiques et environnementaux, et il a été reconnu par la "Society of Professional Journalists". Son journalisme a bénéficié aussi du soutien de "The Nation Institute's Type Investigations".]

C’est un océan de conflits et de détérioration écologique. Malgré sa vaste superficie – 1,3 million de kilomètres carrés – la mer de Chine méridionale est devenue un condensé des tensions géopolitiques entre l’Est et l’Ouest, où les luttes territoriales pour des ressources naturelles abondantes pourraient un jour conduire à l’effondrement de l’environnement.
Alors que la menace d’un conflit militaire dévastateur entre la Chine et les Etats-Unis dans la région plane toujours, la mer de Chine méridionale a déjà subi des dommages irréparables. Des décennies de surexploitation ont, par exemple, eu un impact désastreux sur les ressources halieutiques de cette mer, autrefois abondantes. Les populations de thon, de maquereau et de requin sont tombées à 50% de leur niveau des années 1960. Les atolls de récifs coralliens d’une importance biologique cruciale, qui «se battent» pour survivre à l’augmentation de la température des océans, sont également ensevelis sous le sable et la vase à mesure que l’armée chinoise revendique les îles Spratleys – un archipel de 14 petites îles et de 113 récifs situés dans cette mer – et y construit des infrastructures. Taïwan, les Philippines, la Malaisie et le Vietnam ont également revendiqué un grand nombre de ces îles.
Personne ne devrait s’en étonner puisque les gisements de pétrole et de gaz sont abondants dans la mer de Chine méridionale. Le gouvernement des Etats-Unis estime que 11 milliards de barils de pétrole et 190 billions de pieds cubes [1 pied cube = 0,028 mètre cube] de gaz naturel sont prêts à être extraits de son fond. D’aucuns estiment que ces réserves de combustibles fossiles contribuent – comment ne pas utiliser ce terme? – à alimenter les troubles qui secouent de plus en plus la région.
Cette année, l’Asia Maritime Transparency Initiative, basée à Washington, a signalé (8 mars) que plusieurs pays poursuivaient de nouveaux projets d’exploitation pétrolière et gazière dans ces eaux contestées, ce qui, selon cet organisme, pourrait devenir un «point d’exacerbation des conflits». Entre 2018 et 2021, de nombreux affrontements ont eu lieu entre la Chine, le Vietnam et d’autres pays d’Asie du Sud-Est au sujet des opérations de forage dans ces eaux. On peut craindre que des affrontements encore plus graves se profilent à l’horizon.

Les Etats-Unis, bien sûr, rejettent la responsabilité de tout cela sur la Chine, affirmant que ses projets agressifs de récupération d’îles violent le droit international et «militarisent une zone déjà sous tension et disputée». Pourtant, les Etats-Unis jouent également un rôle important dans l’augmentation des tensions dans la région en acceptant de fournir à l’Australie des sous-marins à propulsion nucléaire dans le cadre du pacte de sécurité Australie-Royaume-Uni-Etats-Unis (AUKUS). L’objectif est sans aucun doute de freiner les activités chinoises en brandissant la menace de la puissance militaire occidentale. «Les prochaines étapes pourraient consister à baser des plateformes états-uniennes à capacité nucléaire – telles que des bombardiers stratégiques – en Australie, ainsi qu’à coopérer sur les missiles hypersoniques, les cyberopérations [et] l’informatique quantique», écrit Derek Grossman pour la Rand Corporation, l’«académie paramilitaire» de la politique de défense américaine (15 avril). En fait, les Etats-Unis se préparent manifestement à déployer bientôt dans ce pays les premiers B-52 à capacité nucléaire. .../...
Mais il y a une question à se poser: toutes ces tentatives d’intimidation internationales concernent-elles uniquement les combustibles fossiles? Les routes commerciales qui traversent la région sont également vitales pour l’économie chinoise, tandis que ses pêcheries représentent 15% des prises mondiales de poissons. Pourtant, ni ces routes maritimes très fréquentées, nécessaires à la circulation des marchandises sur le plan mondial, ni ces ressources halieutiques n’expliquent entièrement la controverse qui ne cesse de s’intensifier à propos de cette région. Après avoir exploité les ressources de poissons de cette mer pendant des décennies, la Chine est en train de devenir un leader mondial dans le domaine de la pisciculture, qui représente déjà 72% de la production nationale de poisson. Mais est-il possible qu’un autre ensemble de ressources naturelles, sans doute plus cruciales pour l’avenir économique des superpuissances mondiales, vienne s’ajouter à la discorde territoriale croissante pour savoir qui possède les biens en mer de Chine méridionale?

L’exploitation minière de la grande bleue 

On pourrait parler d’une course vers les fonds marins, avec la Chine en tête. En décembre 2022, ce pays a dévoilé son Ocean Drilling Ship, un navire d’exploitation minière en eaux profondes (DSM-deep sea mining) de la taille d’un croiseur de combat, qui devrait être opérationnel d’ici 2024. Au lieu d’être armé, le navire est équipé d’un matériel d’excavation de pointe capable de forer à des profondeurs de près de 10’000 mètres. Sur terre, les Chinois détiennent déjà un quasi-monopole sur les métaux considérés comme vitaux pour le développement des énergies «vertes», notamment le cobalt, le cuivre et le lithium. Actuellement, les Chinois contrôlent 60% de l’offre mondiale de ces métaux «verts» et s’intéressent désormais aux abondantes ressources qui existent également sous le plancher océanique (lithosphère en termes géologiques). Selon certaines estimations, les fonds marins contiendraient 1000 fois plus de terres rares que la terre ferme.
Il est difficile de croire que la dévastation des profondeurs de l’océan par la recherche et l’extraction de minéraux pour les batteries électriques et d’autres technologies pourrait constituer un moyen durable de lutter contre le changement climatique. En effet, l’exploitation minière sous-marine risque d’avoir un impact catastrophique, notamment en détruisant la biodiversité. A l’heure actuelle, il est impossible d’évaluer les dommages causés par ces opérations, car l’exploitation minière en eaux profondes n’est pas soumise à des études d’impact sur l’environnement.
Le traité de l’ONU de protection de la haute mer et des fonds marins, ratifié en mars 2023, n’a pas réussi à inclure des règles environnementales réglementant ces pratiques après que la Chine a bloqué toute discussion sur un éventuel moratoire ayant trait à l’exploitation des fonds marins. Depuis 2022, la Chine est titulaire de cinq contrats d’exploration délivrés par l’Autorité internationale des fonds marins (AIFM) des Nations unies, ce qui lui permet d’effectuer des tests et de prélever des échantillons sur le fond de l’océan. Si cet organe des Nations unies peut répartir ces contrats, il n’a pas le pouvoir de réglementer l’industrie elle-même, ni le personnel nécessaire pour le faire. Les scientifiques s’inquiètent donc du fait que l’exploitation minière en eaux profondes sans entrave pourrait causer des dommages irréparables, notamment en tuant des organismes marins et en détruisant des habitats fragiles. .../...

Capitalisme et climat
Partout dans le monde, le pétrole et le charbon appartiennent de plus en plus au passé. Selon un rapport publié en juin 2023 par l’Agence internationale de l’énergie (AIE), les énergies renouvelables «devraient augmenter de 107 gigawatts (GW), soit la plus forte hausse absolue jamais enregistrée, pour atteindre plus de 440 GW en 2023Les ressources naturelles qui alimentent cette montée en puissance des énergies renouvelables, comme le cuivre et le lithium, sont en train de devenir la nouvelle version en vogue des combustibles fossiles. Les marchés favorisent l’abandon progressif des sources d’énergie qui réchauffent le climat, ce qui explique pourquoi la Chine et les Etats-Unis vont de l’avant dans l’exploitation de minéraux essentiels pour les énergies renouvelables, non pas parce qu’ils se soucient de l’avenir de la planète, mais parce que l’énergie verte devient rentable. .../...
Le Forum économique mondial (WEF, 2 novembre 2022) estime que trois milliards de tonnes de métaux et de minéraux fins seront nécessaires à la transition énergétique mondiale si nous voulons atteindre zéro émission de dioxyde de carbone d’ici 2050 – et ce chiffre ne fera sans doute qu’augmenter dans les décennies à venir. Bien entendu, les investisseurs adorent encaisser des bénéfices et l’explosion prochaine de l’exploitation des métaux verts sur terre et dans les eaux de la planète sera certainement une aubaine pour Wall Street et ses équivalents dans le monde entier. BloombergNEF (BNEF, 18 janvier 2023), qui couvre les marchés mondiaux, affirme que la demande de métaux et de minéraux clés pour la transition énergétique sera au moins multipliée par cinq au cours des 30 prochaines années, ce qui représente une opportunité de quelque 10 000 milliards de dollars. L’enjeu est l’extraction de minéraux indispensables comme le lithium et de métaux traditionnels comme le cuivre, qui seront utilisés dans la production d’électricité, les réseaux électriques, le stockage de l’énergie et les transports.
«La transition énergétique pourrait déboucher sur un super-cycle pour l’industrie des métaux et des mines», explique Yuchen Huo, analyste minier pour BNEF. «Ce cycle sera alimenté par une expansion massive des technologies d’énergie propre, ce qui stimulera la croissance de la demande de minéraux indispensables et de métaux traditionnels
Il n’est donc pas surprenant que des pays comme la Chine et les Etats-Unis s’affrontent (peut-être trop au sens littéral) pour l’accès aux ressources naturelles limitées qui sont essentielles à la transition énergétique mondiale. Le capitalisme en dépend. De l’Afrique à la mer de Chine méridionale, les pays parcourent le monde à la recherche de nouvelles entreprises énergétiques rentables. Dans l’océan Pacifique, qui couvre 30% de la surface de la Terre, la recherche de nodules polymétalliques incite les gouvernements des îles à ouvrir leurs eaux à l’excavation de manière significative. Les îles Cook ont déjà délivré des permis pour l’exploration des profondeurs de l’océan proche. Kiribati, Nauru et Tonga ont financé des missions d’exploration des gisements de la zone de Clarion Clipperton, une zone de 1,7 million de kilomètres carrés s’étendant entre l’île de Kiribati et le Mexique. .../...


_______________________________________________

Course aux minerais stratégiques : Les États-Unis déploient leurs cartes pour contrecarrer l’influence chinoise en Afrique
Manal Lallali. La REVUE du CAIUM. 04/12/023

medium.com/caium/course-aux-minerais-stratégiques-les-états-unis-déploient-leurs-cartes-pour-contrecarrer-5517d1d07d9a

[*Manal Lallali : Étudiante au doctorat en science politique à l’Université du Québec à Montréal. Elle est rédactrice pour la revue du CAIUM, spécialisée dans les relations sino-africaines. Elle est également membre du Pôle de recherche sur l’Afrique et le monde émergent (PRAME). Déjà titulaire d’une maîtrise en science politique, elle réalise une thèse qui explore les nouvelles formes de dépendance que génèrent les relations sino-africaines, avec comme cas d’étude la République démocratique du Congo. Ses intérêts de recherches portent notamment sur l’essence et la croissance des relations sino-africaines, le niveau d’endettement et le commerce des ressources naturelles et l'intégration des migrants chinois en Afrique. Etc. .../...]

Une nouvelle compétition entre les États-Unis et la Chine est en cours, avec pour objectif de briser la domination de Pékin dans ce domaine. Cette rivalité s’intensifie dans le contexte de la course aux ressources minérales stratégiques, essentielles pour la transition énergétique et le développement de technologies de pointe telles que les batteries électriques et les dispositifs électroniques. En s’intéressant à l’Afrique, les États-Unis cherchent activement à diversifier leurs sources d’approvisionnement en minerais, réduisant ainsi leur dépendance à l’égard de la Chine. En parallèle, la Chine, qui a longtemps joué un rôle prépondérant dans la production et le raffinage de ces ressources, cherche à consolider sa position dominante. Cette compétition a des implications importantes tant sur le plan économique que géopolitique, façonnant la manière dont ces deux puissances mondiales entendent sécuriser leurs approvisionnements en ressources critiques. Elle souligne également l’importance croissante des ressources minérales dans la politique mondiale et met en lumière les enjeux stratégiques entourant le contrôle de ces matières premières essentielles.

La quête des ressources minérales stratégiques
Les ressources minérales stratégiques, souvent appelées “terres rares” et “métaux critiques,” sont devenues les joyaux de l’industrie moderne. Elles incluent des éléments tels que le lithium, le cobalt, le néodyme, le graphite, le cuivre et bien d’autres. Ces matériaux sont indispensables pour les industries émergentes telles que les véhicules électriques, par exemple, qui sont devenus le fer de lance de la transition vers une mobilité plus propre, réduisant ainsi les émissions de gaz à effet de serre. Cependant, leur production en masse dépend fortement du lithium, du cobalt et du néodyme, des éléments présents dans les batteries et les moteurs électriques. De même, les énergies renouvelables, telles que l’énergie solaire et éolienne, nécessitent des quantités substantielles de métaux critiques comme le cuivre, qui est essentiel pour la conduction électrique efficace.
En réalité, leur influence dépasse largement la simple réponse aux exigences des secteurs en émergence. Ces composants jouent un rôle essentiel dans la réalisation de la transition vers une économie plus durable et respectueuse de l’environnement. Par conséquent, la demande de ces minéraux continue de s’accroître, et la question de leur disponibilité revêt une importance cruciale tant pour les économies nationales que pour le bien-être des populations.
Sur le plan géopolitique, la course aux ressources minérales stratégiques a suscité des préoccupations quant à la dépendance envers des sources d’approvisionnement externes, en particulier vis-à-vis de la Chine. Le monopole chinois sur la production de certaines terres rares a incité de nombreux pays à chercher des alternatives et à diversifier leurs sources d’approvisionnement. Les États-Unis, par exemple, ont intensifié leurs efforts pour relancer leur industrie minière intérieure et réduire leur dépendance à l’égard des importations chinoises. Cette rivalité pour l’accès à ces ressources précieuses a le potentiel de remodeler l’équilibre des pouvoirs mondiaux et de provoquer des tensions diplomatiques et commerciales.

La Chine en position de force
Ces matériaux sont à la base de l’économie moderne, et les projections indiquent qu’au cours des décennies à venir, le monde aura un besoin encore plus pressant de ces ressources que ce qui est actuellement produit. Cela pose un défi stratégique pour les États-Unis, car la Chine exerce une domination incontestée sur les chaînes d’approvisionnement mondiales en métaux critiques, représentant environ 60 % de la production mondiale et 85 % de la capacité de transformation. Cette position de force a permis à la Chine de dicter les prix et de contrôler la distribution de ces ressources essentielles.
De plus, elle a développé une longueur d’avance dans la chaîne d’approvisionnement des batteries électriques, notamment grâce à sa production massive de batteries lithium-ion. Cette avancée technologique a donné à la Chine un avantage concurrentiel significatif sur le marché des véhicules électriques.
Pékin a suivi une stratégie sur plusieurs décennies visant à assurer un approvisionnement fiable en matières premières essentielles, grâce à des initiatives telles que « la Ceinture et la Route » et d’autres efforts. Les entreprises chinoises, soutenues par l’État, ont acquis des participations dans des sociétés minières réparties sur cinq continents. En Afrique, la Chine a déjà une présence significative. Par exemple, en République démocratique du Congo (RDC), qui est le fournisseur de 70 % du cobalt mondial, des entités chinoises possèdent ou détiennent des parts dans pratiquement toutes les mines en activité du pays.

Les États-Unis ripostent
Face à la dépendance croissante vis-à-vis de la Chine pour les ressources minérales stratégiques, les États-Unis ont réagi en intensifiant leurs efforts pour renforcer leur propre capacité d’approvisionnement. Cette démarche s’inscrit dans le cadre de la volonté américaine de réduire les vulnérabilités liées à la sécurité nationale et de promouvoir l’innovation dans les secteurs clés.
Le gouvernement américain a adopté des politiques pour encourager la production intérieure de ces ressources, notamment en facilitant l’exploration minière, en finançant la recherche sur les matériaux avancés, et en réduisant les obstacles réglementaires. Les États-Unis ont également cherché à diversifier leurs sources d’approvisionnement en cherchant des partenariats internationaux pour le développement de mines de terres rares.
Pour répondre à la demande croissante et diversifier l’approvisionnement, l’administration Biden s’est tourné vers l’Afrique, qui abrite environ un tiers des ressources minérales mondiales. Une facette de la nouvelle orientation américaine envers l’engagement en Afrique mettra l’accent sur les minéraux stratégiques. Au cours de l’été dernier, la Maison Blanche a dévoilé sa stratégie pour l’Afrique, mettant en évidence l’engagement des États-Unis à soutenir les nations africaines dans l’exploitation de leurs ressources minérales vitales pour favoriser le développement économique tout en contribuant à renforcer des chaînes d’approvisionnement diversifiées, ouvertes et stables.

L’Afrique au cœur de cette compétition
L’Afrique devient le terrain privilégié des initiatives de la Maison-Blanche, qui cherche à renforcer les liens bilatéraux avec les nations africaines dans le domaine de l’extraction et du raffinage des minerais stratégiques.
Les États-Unis prennent l’engagement de révolutionner l’exploitation minière, se démarquant à la fois des méthodes actuelles en Chine et des pratiques passées de l’Occident. En affirmant cela, ils soutiennent qu’ils joueront un rôle crucial dans la transformation des économies africaines.
Pour les entreprises américaines, c’est une occasion inestimable d’étendre leur influence et de sécuriser davantage leurs chaînes d’approvisionnement. Parallèlement, les populations africaines sont encouragées par la perspective d’une exploitation minière plus respectueuse de l’environnement et des droits de l’homme.
Le défi réside dans la concrétisation de ces intentions louables. Les obstacles potentiels comprennent des questions logistiques complexes, des différences culturelles et des préoccupations liées à la souveraineté nationale. De plus, garantir une exploitation minière respectueuse des droits de l’homme et de l’environnement implique des changements significatifs dans les pratiques existantes, ce qui peut être un processus long et complexe.
.../...
Les enjeux environnementaux ne sont pas en reste. L’extraction de ces ressources peut avoir des conséquences graves sur l’environnement, et la course effrénée pour les matières premières soulève des questions sur la durabilité et la gestion responsable de ces ressources. .../... La course aux minerais stratégiques en Afrique est devenue un théâtre d’affrontement entre les États-Unis et la Chine et une manifestation tangible de la rivalité géopolitique et économique actuelle. Alors que la Chine a pris une longueur d’avance en établissant des relations étroites avec de nombreux pays africains, les États-Unis cherchent à contrer cette influence par le biais d’approches plus éthiques et transparentes. Cette compétition a des implications majeures pour l’avenir de l’Afrique, car elle peut contribuer à façonner la manière dont le continent gère ses ressources naturelles, son développement économique et sa place dans l’arène mondiale. Il est essentiel que les pays africains jouent un rôle actif dans cette compétition pour tirer le meilleur parti de leurs ressources tout en préservant leur souveraineté et en promouvant le bien-être de leurs citoyens. .../...


_______________________________________________


Géopolitique de l’Arctique : une région sous haute tension
Par Caroline Henriques ; 30 décembre 2024

les-yeux-du-monde.fr/mondialisation-enjeux/55095-arctique-geopolitique-conflits-puissances-tensions-fonte-glaces-frontieres/

[*Caroline Henriques : actuellement étudiante à NEOMA Business School, après avoir effectué deux années de classe préparatoire, et rédactrice au sein de plusieurs plateformes d’information. Son expérience inclut des contributions régulières pour le média "Les e-novateurs": axé sur le numérique responsable et pour le collectif "La Revue [DEMOS]", dont l’objectif est de favoriser un accès universel à la culture et pour le site web "Les Yeux du Monde", une référence en matière de décryptage des relations internationales. Elle s’intéresse particulièrement à l’actualité du monde asiatique, à la géopolitique latino-américaine et à la question environnementale.]

.../... En effet, force est de constater que l’Arctique, territoire glacé aux ressources abondantes, se transforme peu à peu en théâtre de rivalités internationales. L’exploitation des ressources naturelles et l’ouverture de nouvelles routes maritimes ont placé cette région au centre des enjeux géopolitiques mondiaux. Au-delà des intérêts économiques, c’est un véritable jeu de puissance qui s’y tient, avec des acteurs historiques comme la Russie et le Canada, mais aussi des pays éloignés comme la Chine, qui tentent de s’y imposer. Dans cet équilibre fragile, l’Arctique incarne à la fois un espoir de prospérité et un terrain de tensions, où les tentatives de coopération pourraient bien se heurter aux vices de la concurrence.

L’Arctique, une région riche en ressources naturelles
L’Arctique regorge de ressources naturelles précieuses. Les eaux arctiques produisent 15 % des prises mondiales de poissons, de fruits de mer et de crustacés, ce qui en fait une zone clé pour l’industrie halieutique. Mais c’est surtout le sous-sol qui suscite les convoitises : en 2023, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) a estimé que la région contenait 13 % des réserves mondiales de pétrole et 30 % des réserves mondiales de gaz naturel. Ces ressources sont cruciales à l’heure où la transition énergétique redéfinit la demande mondiale.
L’Arctique est également riche en métaux rares comme le nickel, le cobalt, le lithium et l’uranium, indispensables à la production des technologies vertes. Le Groenland, par exemple, détient des réserves importantes de terres rares, bien qu’une majorité des habitants aient rejeté leur exploitation en 2021, privilégiant la préservation de l’environnement.
Enfin, le tourisme arctique connaît une croissance rapide. En 2019, il générait déjà 2,5 milliards de dollars américains (USD) et pourrait atteindre 15 milliards USD d’ici 2030, selon le Conseil économique de l’Arctique.

Les populations autochtones face à l’exploitation des ressources
Les populations autochtones de l’Arctique (environ 4 millions d’habitants) dépendent traditionnellement de l’élevage, de la chasse et de la pêche. Les Samis, en Fennoscandie, pratiquent l’élevage des rennes, tandis que les Inuits, au Canada, au Groenland et en Alaska, subsistent grâce à la chasse et à la pêche. L’exploitation industrielle des ressources perturbe ces modes de vie. Les projets extractifs fragmentent les pâturages des Samis, tandis que les déversements de pétrole, comme ceux observés en Russie, polluent les écosystèmes dont dépendent les communautés locales.

L’Arctique, une région stratégique pour le commerce international
Les routes maritimes arctiques agissent en facteurs de recomposition des échanges mondiaux. On dénombre aujourd’hui quatre routes principales.
Le Passage du Nord-Est (PNE) est le plus emprunté (227 navires en 2018). Il longe la côte nord de la Scandinavie, reliant le port de Mourmansk au détroit de Béring. Cette route permet de réduire de 40 % la distance parcourue pour relier l’Asie à l’Europe par rapport à une traversée via le Canal de Suez (c’est le cas du trajet Shanghai-Rotterdam). Lors du Forum sur l’Arctique de juin 2019 à Saint-Pétersbourg, Vladimir Poutine annonçait que le volume annuel transporté via le passage du Nord-Est avait atteint 20 millions de tonnes en 2018.
Le Passage du Nord-Ouest (PNO) relie, lui aussi, l’océan Atlantique à l’océan Pacifique. Il passe entre les îles arctiques du Nord canadien, puis à travers la mer de Beaufort et la mer des Tchouktches. Néanmoins, ce passage, praticable uniquement pendant le court été arctique, reste peu privilégié par les acteurs du commerce international.
Le Pont Arctique, entre Mourmansk en Russie et Churchill au Canada, souffre de conditions climatiques rudes et demeure à l’état de projet.
De même, la Route Transarctique reste hypothétique en raison de la présence de glace dans l’océan Arctique central, posant des contraintes majeures pour la navigation. Néanmoins, cette route pourrait devenir viable rapidement si la fonte des glaces venait à s’intensifier.

La Chine et la Russie : des puissances arctiques ?
Avec ses 24 000 kilomètres de côtes arctiques et sa flotte de brise-glaces nucléaires, la Russie s’affirme comme la « superpuissance arctique » par excellence. Moscou contrôle la majorité du Passage du Nord-Est et exploite intensivement les ressources naturelles régionales. La militarisation de l’Arctique renforce cette suprématie russe : la base militaire de Mourmansk, modernisée en 2014, abrite 50 % de la flotte sous-marine nucléaire du pays.
La Chine, pourtant très éloignée géographiquement de l’Arctique, s’affirme également comme un acteur clé dans la région. Dès 1989, les autorités chinoises créent l’Institut chinois de recherche polaire afin d’engager une coopération scientifique avec les pays limitrophes de l’espace arctique. Actuellement, le pays cherche à renforcer son influence économique et stratégique dans la région. Pékin s’intéresse notamment à l’exploitation des ressources naturelles, à l’ouverture de nouvelles routes maritimes et à la recherche scientifique liée au changement climatique.
Dans un Livre Blanc publié en 2018, Xi Jinping décrit la Chine comme un « État quasi-Arctique » ; une expansion qui n’est pas reconnue par la communauté internationale. Depuis, Xi Jinping a intégré cette zone dans les « Nouvelles Routes de la Soie » et encourage le développement d’une « route de la soie polaire », reliant l’Europe à la Chine. Cette route pourrait s’avérer particulièrement utile pour contourner certains passages dangereux comme le détroit de Malacca ou le Canal de Suez.

Une délimitation territoriale complexe
Depuis l’entrée en vigueur de la Convention de Montego Bay en 1994, bon nombre de pays limitrophes de l’Arctique tentent de s’arroger les zones riches en ressources naturelles.
En 2004, le Danemark est le premier pays à émettre une revendication relative aux zones économiques exclusives (ZEE) de l’océan Arctique. Les autorités danoises suggèrent que le Pôle Nord est une prolongation du plateau continental du Groenland et que, par conséquent, la ZEE du Danemark devrait être réévaluée et élargie.  
Les litiges sur les ZEE reflètent également des rivalités profondes. La Russie, qui revendique une grande partie des eaux de l’océan Arctique, tente depuis le début des années 2000 d’asseoir sa souveraineté sur la région. Le 2 août 2007, dans le cadre de l’opération « Arctique 2007 », des explorateurs ont planté un drapeau aux couleurs de la Russie au fond de l’océan Arctique, un symbole fort faisant écho aux rivalités de Guerre froide.
L’Arctique : terrain d’affrontement des grandes puissances ?
Le Canada, dans cette même volonté d’affirmer son leadership dans la région, déposait en 2019 un dossier d’extension des limites de son plateau continental (1,2 million de kilomètres carrés du fond marin et du sous-sol de l’océan Arctique sont alors revendiqués). En 2022, Eilís Quinn, responsable du site Regard sur l’Arctique, affirmait que le Canada souhaitait étendre la portée de ses revendications, accentuant les chevauchements avec la Russie dans l’Arctique.
Par ailleurs, les velléités expansionnistes de la Chine en Arctique inquiètent les États-Unis. En 2019, lors du Conseil de l’Arctique de Rovaniemi, Michael Pompeo, secrétaire d’État américain, déclare : « Il y a des États arctiques et des États non-arctiques. Il n’existe pas de troisième catégorie, et prétendre le contraire ne donne aucun droit à la Chine. ».
.../...
En conclusion, l’Arctique s’érige en carrefour stratégique où se mêlent convoitises économiques et rivalités géopolitiques. Ressources précieuses et routes maritimes ouvrent de nouvelles perspectives, mais exacerbent les tensions entre les puissances internationales. Si la coopération demeure essentielle, elle se heurte aux rivalités historiques et aux enjeux militaires. Ainsi, l’avenir de l’Arctique se jouera dans l’équilibre délicat entre exploitation et préservation, entre dialogue et rivalité.

_______________________________________________

Les véhicules électriques, la bauxite et la destruction de l’écosystème en Guinée
4 mai 2023 ; par Rachel Chason et Chloe Sharrock

alencontre.org/ameriques/americnord/usa/les-vehicules-electriques-la-bauxite-et-la-destruction-de-lecosysteme-en-guinee.html

[- *Rachel Chason est reporter et responsable du bureau de l'Afrique de l'Ouest pour le Washington Post, elle est diplômée de l'Université de Duke en sciences politiques. Elle sera basée à Dakar, Sénégal, avec des responsabilités couvrant plusieurs pays, dont le Nigeria, le pays le plus peuplé d'Afrique. Elle a été finaliste au prix Pulitzer 2020 pour les Reportages de Nouvelle de dernière heure.
 - *Chloe Sharrock est une photojournaliste française, engagée, spécialisée dans les droits des femmes et les souffrances humaines. Elle se lance dans le photo-journalisme en 2016, après des études d’histoire de l’art et de cinéma, poussée par l’envie de témoigner des tumultes du monde et des soubresauts des sociétés contemporaines. Elle travaille depuis pour les médias français et internationaux en Ukraine et au Moyen Orient, ainsi qu’en Inde autour de thématiques comme les violence faites aux femmes ou les traumatismes sur les populations en guerre. Elle a reçu plusieurs prix et subventions, dont le Prix de la Presse au Salon Photo Paris et des subventions du CNAP et du Ministère de la Culture français. En 2017, elle a été sélectionnée parmi les « 30 femmes photographes de moins 30 ans » par le media Artpil.]


KAGBANI, Guinée – L’un des pays les plus pauvres de la planète est devenu un acteur essentiel de la dite transition vers l’énergie verte.
La Guinée, pays d’Afrique de l’Ouest de plus de 13 millions d’habitants, abrite les plus grandes réserves de bauxite au monde, une roche brun-rouge qui constitue le minerai de l’aluminium. Ce métal léger est essentiel pour les véhicules électriques, car il leur permet de parcourir une plus grande distance sans être rechargés que s’ils étaient construits en acier. Au cours de la décennie actuelle, alors que les experts s’attendent à ce que les ventes mondiales de véhicules électriques soient multipliées par neuf, la demande d’aluminium augmentera de près de 40%, pour atteindre 119 millions de tonnes par an, selon les analystes de l’industrie.
La Guinée connaît déjà un boom sans précédent de ses exportations de bauxite. Elles ont presque quintuplé entre 2015 et 2020, selon les statistiques du gouvernement états-unien. Les analystes prévoient que la production continuera d’augmenter de façon spectaculaire au cours de la prochaine décennie. La région de Boké, dans le nord-ouest de la Guinée, au centre de la ruée sur la bauxite, a été transformée par un flux incessant de camions et de trains transportant le précieux minerai le long de routes et de voies ferrées nouvellement construites jusqu’aux ports côtiers.
Mais dans la région de Boké, des milliers de villageois paient un lourd tribut, selon des dizaines d’entretiens avec des habitants de six villages, des ONG de surveillance des entreprises extractives et des experts de l’industrie. Le gouvernement guinéen a indiqué que des centaines de kilomètres carrés autrefois utilisés pour l’agriculture ont été acquis par des sociétés minières pour leurs opérations d’extraction et ce qui est associé: les routes, les chemins de fer et les ports. Les villageois n’ont reçu que peu ou pas de compensation, selon les militants des droits de l’homme et les habitants de la région. Selon une étude gouvernementale, l’exploitation de la bauxite détruira, au cours des vingt prochaines années, plus de 200 000 acres de terres agricoles et 1,1 million d’acres d’habitats naturels, soit une superficie presque équivalente à celle du Delaware [soit 6450 km2].

La demande considérable de véhicules électriques – dont la fabrication nécessite en général six fois plus de minerais que celle des véhicules à combustible fossile – entraîne une nouvelle «ruée vers l’or» pour toute une série de métaux, dont la bauxite, le nickel, le lithium et le manganèse, nécessaires à leur construction et à leur alimentation. Mais alors que les véhicules électriques sont communément considérés comme essentiels pour les efforts mondiaux de lutte contre le changement climatique, les coûts et les conséquences indirectes de la production de ces minerais ont souvent été négligés. Les conséquences de l’exploitation minière sur les communautés locales, les travailleurs, l’environnement et même la stabilité politique ont été peu prises en compte, car une grande partie de l’activité se déroule dans des endroits reculés du monde, allant des villages de pêcheurs d’Afrique de l’Ouest aux îles lointaines d’Asie du Sud-Est.
Sans une estimation d’ensemble complète, la dite transition vers les énergies vertes risque de répliquer l’histoire cruelle des précédentes révolutions industrielles.
Lorsqu’une société minière chinoise est arrivée pour la première fois en 2016 dans ce village guinéen situé près de la côte atlantique, des représentants de la société et des fonctionnaires ont proposé aux habitants des emplois et de l’argent en échange de centaines d’hectares de leurs terres agricoles, se souvient Mohamed Sylla, un habitant du village. Les habitants se sont sentis obligés d’accepter.
Peu de temps après, des dynamitages destinés à construire une route pour la mine de bauxite ont fait voler en éclats les murs en béton de la maison de Mohamed Sylla, obligeant sa femme à fuir pour se mettre à l’abri et sa famille à déménager. Au cours des années qui ont suivi, il a vu les épaisses couches de poussière soulevées par les camions transportant la bauxite détruire les récoltes d’aubergines, de maïs et de noix de cajou des villageois, et les barges transportant le minerai à l’étranger chasser les poissons, autrefois abondants.
Lors d’entretiens, des femmes du nord-ouest de la Guinée ont déclaré qu’elles se désespéraient à présent de leurs maigres récoltes. Des pêcheurs, comme Sylla, 30 ans, ont déclaré qu’ils ramenaient de si petites prises qu’ils pouvaient à peine gagner leur vie. Les villageois ont déclaré que les emplois promis par la Société minière de Boké (SMB) – un consortium comprenant une filiale du plus grand producteur d’aluminium au monde, China Hongqiao Group – ne se sont jamais concrétisés. Les indemnités en espèces se sont révélées extrêmement décevantes. .../...

La Guinée devient un acteur mondial .../...
Sous la présidence d’Alpha Condé [de décembre 2010 à septembre 2021], le gouvernement guinéen a accordé un permis à la SMB en 2015. A peu près au même moment, l’Indonésie et la Malaisie restreignaient leurs propres exportations de bauxite en raison de préoccupations concernant, respectivement, l’exploitation des ressources par des étrangers et la dégradation de l’environnement. La SMB a expédié sa première tonne de bauxite de Guinée en l’espace de six mois, avant même que le ministère de l’Environnement n’ait terminé ses études d’impact, selon les défenseurs des droits.
La SMB a rapidement dépassé la Compagnie des Bauxites de Guinée (CBG) – une multinationale vieille de 50 ans, détenue conjointement par le gouvernement guinéen et des entreprises privées, dont la société américaine Alcoa et la société anglo-australienne Rio Tinto – pour devenir le plus grand producteur de bauxite de Guinée. En l’espace de cinq ans seulement, la production a augmenté si rapidement que la Guinée est passée d’une fraction de 6% du marché mondial de la bauxite à 22%.
Pendant ce temps, la révolution des véhicules électriques prenait son essor, stimulée par une demande sans précédent en Chine, où 1,8 million de véhicules ont été vendus en 2020, nécessitant près de 900 millions de livres d’aluminium, selon CRU, une société de conseil en affaires qui analyse les industries minières et métallurgiques [basée à Londres]. D’ici 2030, date à laquelle CRU estime que la Chine vendra jusqu’à 18,5 millions de véhicules électriques, elle aura besoin d’un volume gigantesque de 8,8 milliards de livres d’aluminium.
Bien que plus petit, le marché états-unien des véhicules électriques prend également de l’ampleur, puisqu’il devrait plus que quintupler entre 2020 et 2028. La chaîne d’approvisionnement en aluminium des constructeurs automobiles américains, dont Ford, General Motors et Tesla, comprend de la bauxite extraite par les deux principaux producteurs de Guinée, selon un rapport publié en 2021 par Human Rights Watch et Inclusive Development International, une structure basée aux Etats-Unis qui vise à défendre les communautés menacées par le développement des entreprises.
Ibrahima Diallo, un ancien fonctionnaire du gouvernement, a déclaré que l’expansion rapide de l’industrie de la bauxite en Guinée est à bien des égards une réussite. Selon lui, elle a créé des milliers d’emplois et des millions de dollars de recettes fiscales annuelles. Mais il a ajouté que le gouvernement était mal préparé à l’énorme intérêt suscité par les minerais du pays, et qu’il ne disposait pas des moyens de protéger l’environnement ou de canaliser les revenus vers les régions les plus touchées par le boom. «Nous ne pouvions pas imaginer, même nous, les experts miniers, que c’était possible», a déclaré Ibrahima Diallo, qui termine aujourd’hui son doctorat en exploitation minière. «C’était une énorme explosion… Et personne n’était prêt
.../...
Un manque de responsabilité
L’exploitation à ciel ouvert de la bauxite est intrinsèquement nuisible. Les experts de l’industrie reconnaissent que la perte de terres, la perturbation des habitats de la faune et de la flore, le bruit et la poussière sont inévitables. Ils s’accordent à dire que l’atténuation des dommages nécessite une réglementation efficace, l’implication des communautés et une surveillance rigoureuse. Jusqu’à présent, tous ces éléments ont fait cruellement défaut en Guinée.
Le Natural Resource Governance Institute, une organisation basée à New York qui milite en faveur d’un développement durable et inclusif, a attribué au gouvernement guinéen une note «médiocre» pour le contrôle de la corruption en 2021 et une note «défaillante» pour l’Etat de droit. Mamadou Oury Bah, un militant d’ "Action Mines Guinée", a déclaré qu’un contrôle efficace était impossible sous le gouvernement d’Alpha Condé en raison de la corruption omniprésente. .../...
La bauxite extraite en Guinée est expédiée à l’étranger pour être raffinée en alumine, qui est à son tour fondue en aluminium. La SMB envoie son minerai au China Hongqiao Group, le plus grand producteur d’aluminium au monde, tandis que la CBG expédie sa bauxite à des raffineries aux Etats-Unis, au Canada et en Europe, selon IDI.
Les principaux constructeurs automobiles mondiaux, qui achètent le métal affiné, ne cartographient pas leurs chaînes d’approvisionnement en aluminium jusqu’au niveau de la mine et, par conséquent, ne les contrôlent pas de manière adéquate pour détecter les abus, selon le rapport de Human Rights Watch et de l’IDI. Les ONG ont qualifié la bauxite d’«angle mort» pour les constructeurs automobiles. Plusieurs constructeurs automobiles ont réagi à leurs conclusions, soulignant la complexité des chaînes d’approvisionnement comme un obstacle à l’identification de la source de leur aluminium.
Ford et Tesla n’ont pas répondu aux demandes de d’informations pour cet article. General Motors a refusé de répondre aux préoccupations spécifiques concernant l’extraction de la bauxite, mais a communiqué ses lignes directrices générales en matière de droits de l’homme et de responsabilité des entreprises. .../...


______________________________________________

La guerre secrète d’Israël contre la Syrie, le Liban et la Jordanie pour l’eau
Par Mohamad Hasan Sweidan ; publications : The Cradle, 14 janvier 2025 ; Mondialisation.ca, 15 janvier 2025

mondialisation.ca/la-guerre-secrete-disrael-contre-la-syrie-le-liban-et-la-jordanie-pour-leau/

[*Mohamad Hasan Sweidan est professeur Universitaire, chercheur en études stratégiques, rédacteur pour différentes plateformes médiatiques et auteur de plusieurs études dans le domaine des relations internationales. Il se concentre principalement sur les affaires russes, la politique turque et la relation entre la sécurité énergétique et la géopolitique. Il aborde des sujets tels que l'avenir de la Syrie post-Assad, en questionnant la possibilité d'une unité nationale face aux divisions internes et aux influences étrangères.]

Début janvier, moins d’un mois après la prise de Damas par les forces rebelles et le renversement du gouvernement syrien, les forces d’occupation israéliennes ont lancé une offensive incontestée jusqu’aux abords du barrage Al-Mantara – une source d’eau essentielle pour Deraa et le plus grand barrage de la région, situé dans la campagne occidentale de Quneitra.
Les rapports indiquent que les chars et les troupes israéliens ont établi des avant-postes militaires, élevé des talus et imposé des restrictions strictes à la circulation locale, n’autorisant l’accès qu’à des heures précises et prédéterminées.

Géopolitique de l’eau
Les ressources naturelles ont toujours joué un rôle central sur le plan géopolitique, et parmi elles, les sources d’eau douces ont de plus en plus disputées. Alors que le pétrole et le gaz font les gros titres, le rôle indispensable de l’eau dans l’agriculture, l’industrie et la vie quotidienne en fait un facteur tout aussi essentiel de la stabilité mondiale.
Alors que les ressources en eau douce se raréfient, le risque de conflit autour de cette précieuse ressource augmente, menaçant le développement économique et la stabilité sociale.
De tout temps, les nations se sont disputé le contrôle des territoires riches en eau pour sécuriser les routes commerciales, forger des alliances et favoriser les avancées technologiques. Les anciennes civilisations du berceau de la civilisation, comme les Sumériens et les Babyloniens, ont prospéré en exploitant le Tigre et l’Euphrate. En revanche, les régions pauvres en ressources sont souvent restées à la traîne, limitant leurs progrès politiques et technologiques.
Aujourd’hui, la pénurie en eau continue de façonner les stratégies politiques régionales. Le bassin du Nil en est un exemple marquant, où l’Égypte, le Soudan et l’Éthiopie sont en conflit au sujet du barrage de la Grande Renaissance Éthiopienne (GERD).
Ce projet, la plus grande initiative hydroélectrique d’Afrique, a exacerbé les tensions diplomatiques avec l’Égypte, qui dépend du Nil pour 90 % de son eau douce.
La région de l’Asie de l’Ouest et de l’Afrique du Nord est confrontée à une pénurie d’eau sans précédent, 83 % de sa population étant soumise à un grave manque d’eau. Selon le World Resources Institute, 12 des 17 pays les plus touchés par la pénurie d’eau sont situés dans cette région, le Qatar, Israël et le Liban occupant les trois premiers rangs.
En outre, environ 40 % de la population mondiale dépend de cours d’eau franchissant des frontières internationales, faisant de la gestion transfrontalière de l’eau un enjeu géopolitique majeur. La récente incursion israélienne au barrage d’Al-Mantara illustre parfaitement cette réalité.
La demande mondiale en eau devrait augmenter de 20 à 25 % d’ici à 2050, soumettant des régions comme le WANA [Asie de l’Ouest et Afrique du Nord] à une pression considérable. D’ici le milieu du siècle, 100 % de la population de la région pourrait être confrontée à une pénurie d’eau extrême, ce qui déstabiliserait davantage les relations politiques et augmenterait le risque de conflits entre États au sujet des ressources en eau partagées.
De telles tensions sont déjà manifestes en Israël et en Syrie, où le contrôle des sources d’eau vitales est devenu un sujet de discorde.

Réalités et ambitions d’Israël relatives à l’eau
Le climat aride et les ressources naturelles en eau limitées de la Palestine ont depuis longtemps influencé l’approche de l’État d’occupation en matière de gestion de l’eau, les déserts constituant plus de la moitié de son territoire. Les principales sources d’eau douce du pays sont la mer de Galilée, le Jourdain et les nappes aquifères le long de la côte et des montagnes.
Cependant, les avancées technologiques en matière de désalinisation et de réutilisation des eaux usées ont aidé Israël à réduire sa dépendance à l’égard des sources d’eau naturelles. En 2018, Israël a réutilisé 87 % de ses eaux usées traitées, principalement à des fins agricoles.
Cependant, ces innovations ont leurs limites. La désalinisation et le traitement des eaux usées sont coûteux et ne peuvent compenser totalement les effets du changement climatique. La hausse des températures, la diminution des précipitations et la réduction des taux de renouvellement des nappes aquifères aggravent la pénurie d’eau en Israël, tout comme la baisse des niveaux d’eau et l’augmentation de la salinité du lac Kinneret, ainsi que la poursuite du processus de désertification dans le sud du pays.
Pour relever ces défis, Israël s’est employé à collecter et à traiter environ 94 % des eaux usées, dont 87 % sont réutilisées, principalement pour l’agriculture. Globalement, entre 2000 et 2018, la part de l’agriculture dans les prélèvements d’eau douce est passée de 64 à 35 % du total des prélèvements d’eau.
Ces défis ont contraint Israël à se tourner vers des sources d’eau régionales, telles que le fleuve Yarmouk en Jordanie et le fleuve Litani au Liban, pour compléter ses besoins.
L’eau est la pierre angulaire de la stratégie d’Israël depuis les premiers jours du mouvement idéologique sioniste. Depuis la création de l’État à travers les guerres, les occupations et les négociations avec les États arabes voisins, l’accès à l’eau a été une priorité stratégique pour Israël. Cette approche consiste à maximiser l’utilisation de l’eau à l’intérieur et à l’extérieur de ses frontières, même au détriment de la sécurité hydrique des pays voisins.
Les premiers dirigeants sionistes, tels que Chaim Weizmann, ont souligné l’importance de l’eau provenant de régions telles que le mont Hermon, récemment occupé en Syrie, et le fleuve Litani, au Liban, pour l’irrigation et le développement économique.
Le fondateur du sionisme moderne, Theodor Herzl, a insisté dès le départ sur la nécessité d’inclure le Sud-Liban dans l’État juif, en partie parce qu’il contient des sources d’eau vitales. Le mouvement sioniste a exercé une pression considérable lors de la conférence de paix de 1919 à Paris, cherchant à annexer à la Palestine les sources du Jourdain, du Litani et de la plaine du Hauran en Syrie. Ces demandes ont toutefois été rejetées par la partie française, qui avait le mandat sur la Syrie et le Liban en vertu de l’accord Sykes-Picot de 1916.
En 1941, David Ben-Gourion, qui deviendra plus tard le premier Premier ministre d’Israël, a clairement révélé que le futur État israélien convoitait le fleuve Litani, en déclarant : “Nous ne devons pas perdre de vue que le Litani doit se situer à l’intérieur des frontières de l’État juif afin d’assurer sa viabilité”.
Après 1948, Israël a nationalisé ses ressources en eau et lancé des projets ambitieux, comme le National Water Carrier, pour transporter l’eau du nord vers le sud aride.
.../...
La guerre de 1967 a marqué un tournant, Israël prenant le contrôle de territoires riches en eau comme la Cisjordanie, Gaza et le plateau du Golan. Ces régions fournissent désormais une part importante de l’approvisionnement en eau d’Israël.
Toutefois, ce contrôle s’est fait aux dépens des États voisins et des Palestiniens, confrontés à de sévères restrictions en matière d’accès à l’eau. Par exemple, la consommation d’eau par habitant en Palestine est en moyenne de 20 mètres cubes par an, contre 60 mètres cubes en Israël.
Le gouvernement israélien réglemente strictement l’utilisation de l’eau par les Palestiniens, en interdisant le forage de nouveaux puits et en infligeant des amendes en cas de dépassement des quotas, alors que les colonies israéliennes ne sont soumises à aucune restriction de ce type. Il en résulte une terrible inégalité dans l’accès à l’eau, l’agriculture palestinienne restant arriérée et inefficace, tandis que les colonies juives des territoires palestiniens bénéficient de systèmes d’irrigation modernes.
.../...
Malgré ces défis, les récentes actions d’Israël dans le sud de la Syrie illustrent une stratégie cohérente visant à pallier ses pénuries d’eau par le biais d’une expansion régionale. Les bouleversements politiques en Syrie ont offert à l’État d’occupation une occasion historique de faire avancer ses objectifs.
Les événements en cours en Asie occidentale démontrent que le principal moyen de dissuasion contre l’exploitation par Israël des ressources en eau du Liban a toujours été une résistance efficace. Jusqu’aux revers stratégiques majeurs subis par l’Axe de la Résistance, cette résistance a réussi à empêcher Israël de reproduire ses conquêtes territoriales en matière d’eau dans la région. Aujourd’hui, en prenant le contrôle d’infrastructures hydrauliques vitales, les ambitions d’Israël constituent une menace directe pour la Syrie, la Jordanie et le Liban. .../...


______________________________________________

Nord-Sud : Les 9 types de violence que les pays riches infligent au Sud global
Par Tamara Pearson ; 4 décembre 2024 ; traduit de l’anglais par Bernard Tornare.

b-tornare.overblog.com/2024/11/les-9-types-de-violence-que-les-pays-riches-infligent-au-sud-global.html
relayé sur :
investigaction.net/les-9-types-de-violence-que-les-pays-riches-infligent-au-sud-global/

[*Tamara Pearson : est une écrivaine, enseignante, journaliste indépendante et activiste, australo-mexicaine, vivant à Puebla, au Mexique. Elle est passionnée par la lutte contre l’exclusion de nombreuses voix dans les médias et dans l’édition. Elle promeut une écriture libératrice, résistant à l’injustice et raconte avec justesse des histoires d'opprimés ; par exemple, elle soutient les migrants et les réfugiés d'Amérique centrale, ainsi que d'autres militantismes autour des droits à l'eau et de l'environnement. Elle est l’auteure de deux romans littéraires et d’un livre pour enfants, et rédige le prestigieux bulletin d’information Exclud Headlines, avec Global South News ; autrice notamment de "The Butterfly Prison" (Open Books, 2015), éditrice du blog Resistance Words. Elle est diplômée en science politique, relations internationales, et en pédagogie alternative. Elle a écrit pour de nombreux médias alternatifs et progressistes comme New Internationalist, Truthout, teleSUR, Green Left Weekly, etc.]

Les pays riches et impérialistes du Nord global commettent une longue liste de crimes contre les populations d'Amérique latine, d'Afrique, du Moyen-Orient et d'Asie. Des bombardements à la destruction de l'environnement, en passant par l'effacement médiatique, les puissantes entités économiques et politiques du Nord global génèrent et maintiennent intentionnellement des catastrophes, puis les normalisent.
Mais aujourd’hui en particulier, ce qui était autrefois obscurci par un épais voile glouton de contes de fées hollywoodiens, machistes et blancs, et de récits arrogants et fragiles sur l’apport de la démocratie à un Sud global barbare, est maintenant plus difficile à nier avec le génocide à Gaza et le pillage continu de la planète.
Mon dernier roman, The Eyes of the Earth [Les Yeux de la Terre], décode les aspects plus humains et personnels de ce pillage, et révèle les personnes qui y résistent, de manière belle et magique. Ci-dessous, cependant, voici un aperçu des neuf principaux types de violence structurelle commis.

1. L’industrie de la mort
Le meurtre sans retenue à Gaza est à la fois un génocide intentionnel, une prise de terres et un projet lucratif pour l’industrie de l’armement. La société de défense israélienne Elbit Systems a annoncé des bénéfices plus élevés au deuxième trimestre en août et prévoit d’ouvrir une nouvelle usine de munitions dans le sud d’Israël, tandis qu’Israël a testé et utilisé de nouvelles armes dans ses guerres, puis a essayé de vendre cette technologie lors de diverses foires internationales d’armement. Les fabricants d’armes américains, notamment Boeing, Lockheed Martin, RTX, General Dynamics, Northrop Grumman et L3Harris, ont vu leurs bénéfices dépasser les attentes cette année.
Par ailleurs, récemment, les États-Unis construisent cinq nouvelles bases militaires en Somalie et ont frappé plusieurs villes au Yémen. Les sociétés transnationales européennes fournissent des armes et des munitions pour la guerre au Yémen. Les États-Unis ont été le moteur de l’intervention militaire en Haïti.
Le Nord global utilise ces guerres pour maintenir son hégémonie et son contrôle sur les régions et les ressources. En 2023, les dépenses militaires totales s’élevaient à 2 400 milliards de dollars, les États-Unis étant le plus gros dépensier, représentant près de la moitié de ce montant. Plus de 80 % des 100 principales sociétés d’armement ont leur siège dans le Nord global.

2. Le Nord global pollue et surconsomme, le Sud global souffre
Une autre COP, et le Nord global et les grandes entreprises se concentrent sur la défense de leurs intérêts économiques plutôt que sur la défense de notre planète. Comme l’année dernière à la COP28, lorsqu’il y a eu un accord pour s’éloigner du charbon, du pétrole et du gaz, mais que les nations riches se sont ensuite lancées dans une frénésie d’exploration pétrolière et gazière, cette année, elles se dérobent également à tout engagement réel, sans parler de faire face à leur responsabilité pour les dommages causés au Sud global. Cette année, les lobbyistes des combustibles fossiles ont reçu plus de laissez-passer (1 773) pour la COP29 que tous les délégués des 10 nations les plus vulnérables au climat réunis (1 033).
Pendant ce temps, la situation dans les pays pauvres va de mal en pis. Du Cap au Caire, la sécheresse, les inondations graves et les tempêtes détruisent des vies, des cultures, la biodiversité, les infrastructures et les moyens de subsistance. Bien que les catastrophes frappent également le Nord global, les pays pauvres manquent de ressources pour se remettre.
Le Nord global consomme de manière excessive, tandis qu’une grande partie du Sud global est confrontée à la pénurie. Le Nord externalise sa pollution vers le Sud ; en utilisant des accords commerciaux forcés, les pays du Sud global sont souvent contraints d’avoir des réglementations environnementales plus faibles, dont les entreprises profitent ensuite. Des entreprises comme Smithfield Foods, par exemple, produisent du porc au Mexique, privant les habitants d’eau et contaminant les sols et les sources d’eau, puis exportent une grande partie de ce porc aux États-Unis. Les pays riches déplacent les pénuries d’eau vers les régions plus pauvres en important des produits gourmands en eau comme les légumes, les fruits et la viande. Dans le même temps, des pays comme le Nigéria sont devenus une décharge de déchets électroniques pour l’Europe et les États-Unis, avec des conséquences sur la santé des habitants et l’environnement.
Le Nord global est responsable d’environ 92 % des émissions de gaz à effet de serre, les États-Unis à eux seuls de 25 % des émissions mondiales, l’Amérique du Sud de seulement 3 % et l’Afrique de moins de 4 %. Cependant, huit des dix pays les plus touchés par le changement climatique se trouvent en Afrique. Pour les pertes et dommages causés, le Nord global devra 192 milliards de dollars d’ici 2050, soit 5 000 milliards de dollars par an.

3. Vol de ressources
Il y a un transfert continu de richesse du Sud global vers le Nord, où le Sud est utilisé comme un réservoir de ressources et de main-d’œuvre bon marché, que les sociétés du Nord convertissent en profits qui restent dans le Nord. L’inégalité entre les pays riches et pauvres n’est pas naturelle : elle est constamment créée et renforcée.
Israël ne se contente pas de bombarder Gaza, il veut aussi piller ses réserves de gaz offshore, et fin octobre 2023, le gouvernement a annoncé qu’il avait accordé des permis d’exploration de gaz naturel à des sociétés israéliennes et étrangères. Les multinationales volent les minéraux et les matériaux de la République démocratique du Congo. Pendant que des entreprises comme Apple, Samsung, Huawei exploitent le cobalt du Congo, la population y souffre du travail forcé et de la traite des êtres humains, du travail des enfants, de conditions de travail dangereuses et de dommages environnementaux extrêmes.
Ce type de pillage – à la fois historique et actuel – sur des terres volées aux peuples autochtones et utilisant le travail d’esclaves, a financé les infrastructures dans le Nord global, tandis qu’il a fait partie du génocide, de la dépossession, de la famine et de l’appauvrissement massif dans le Sud. Aujourd’hui, le Nord global draine des matières premières d’une valeur de 2 200 milliards de dollars par an du Sud globalsuffisamment pour mettre fin à l’extrême pauvreté 15 fois, et totalisant 62 000 milliards de dollars de 1960 à aujourd’hui.

4. Commerce inéquitable
En lien avec le vol de ressources et le facilitant, les pays du Nord global utilisent leurs avantages pour mettre en place des subventions et des tarifs qui favorisent leurs entreprises. Ces mesures et régimes commerciaux, inéquitables, offrent des protections aux investisseurs du Nord, favorisent la privatisation et formalisent des mécanismes d’arbitrage qui défendent les entreprises et outrepassent la souveraineté et les lois locales des pays du Sud.
Le commerce inéquitable a donné l’avantage aux industries agroalimentaires américaines du riz et du maïs, de sorte que le maïs américain a inondé le Mexique et son riz a inondé Haïti, et les petits agriculteurs des deux pays n’ont pas pu rivaliser et ont dû migrer en masse vers les villes, conduisant à de vastes étendues de logements informels ou de bidonvilles urbains.
De même, les dix millions de producteurs de coton d’Afrique gagnent en moyenne 400 à 550 dollars par an, perdant collectivement environ 250 millions de dollars par an face aux producteurs de coton fortement subventionnés de l’Ouest. Les accords commerciaux inéquitables entre l’Union européenne et l’Afrique signifient également que les exportations alimentaires de l’Afrique ne sont pas compétitives face aux 50 milliards d’euros dépensés pour maintenir les produits alimentaires européens bon marché. Les excédents de lait européen subventionnés sont transformés en poudre et envoyés en Afrique, décimant son industrie laitière, et il en va de même pour le blé, laissant l’Afrique importatrice nette de denrées alimentaires. Le Sud perd 14 fois plus dans ce commerce inégal qu’il ne reçoit en aide.
.../...
8. Esclaves de la dette
Une autre façon dont le Sud global est à la fois contrôlé et maintenu dans la pauvreté est par la dette. Les Kenyans qui protestaient ont récemment réussi à forcer le président à retirer un projet de loi qui aurait augmenté les impôts, mais ils ont clairement indiqué que c’était le FMI qui imposait ces politiques d’austérité, brandissant des pancartes telles que “Nous ne sommes pas les putes du FMI” et “Le Kenya n’est pas le rat de laboratoire du FMI”. De même au Nigeria, une telle austérité, due à la pression d’un prêt de 2,25 milliards de dollars de la Banque mondiale, a conduit les syndicats nigérians à faire grève. Et quelques jours avant les élections en RDC l’année dernière, le FMI a accordé un décaissement car il ne s’inquiétait pas de qui gagnerait l’élection, sachant que tout parti se sentirait obligé de maintenir son agenda économique néolibéral, y compris la privatisation de l’électricité et des codes miniers qui favorisent les entreprises du Nord global.
Le FMI et la Banque mondiale sont contrôlés par le Nord global, en particulier les États-Unis (les États-Unis sont le plus grand actionnaire de la Banque mondiale et un citoyen américain en est toujours le président). Des prêts sont accordés à des pays qui étaient autrefois riches en ressources, en culture et en connaissances, mais qui, ayant été pillés par le colonialisme, ont été plongés dans la pauvreté matérielle. Aujourd’hui, de nombreux pays dépendent des dépenses étrangères et doivent offrir une main-d’œuvre bon marché et des ressources pour les attirer.
La dette publique dans le Sud global croît deux fois plus vite que dans les autres pays, ces pays ayant payé 847 milliards de dollars l’année dernière rien qu’en intérêts nets. L’année dernière, 54 pays ont consacré au moins 10 % des fonds gouvernementaux au paiement des intérêts de la dette, et 40 % de la population mondiale vit dans des pays qui doivent dépenser plus pour ces paiements que pour l’éducation ou la santé. .../...

_______________________________________________

Gagnants et perdants de la course aux énergies « vertes » : une perspective Nord-Sud
par Laurent Delcourt ; 13 novembre 2023

elcorreo.eu.org/Gagnants-et-perdants-de-la-course-aux-energies-vertes-une-perspective-Nord-Sud

[*Laurent Delcourt est sociologue et historien, auteur de nombreux ouvrages, chargé d’étude au Centre tricontinental (CETRI) : centre d’étude, de publication et de formation sur le développement, les rapports Nord-Sud et les enjeux de la mondialisation en Afrique, en Asie et en Amérique latine. Le CETRI a pour objectif de faire entendre des points de vue du Sud et de contribuer à une réflexion critique sur les conceptions et pratiques dominantes du développement à l’heure de la mondialisation néolibérale. Il s’attache en particulier à la compréhension du rôle des acteurs sociaux et politiques en lutte pour la reconnaissance des droits sociaux, politiques, culturels et écologiques au Sud.)]

Promesse d’un monde décarboné, la transition énergétique n’est ni juste ni durable. Matériellement intensive, elle repousse les frontières de l’extractivisme, déplace le coût du verdissement des économies riches sur les pays en développement et tend à reproduire un rapport de type colonial.
Une juste transition devra corriger les asymétries Nord-Sud et questionner le productivisme et le consumérisme à l’origine des déséquilibres mondiaux.


« Au quotidien, nous dépendons des métaux et des minéraux pour alimenter nos iPhones et acheminer notre électricité. Les technologies numériques nous donnent l’impression de vivre dans une économie éthérée, détachée du monde matériel. En fait, nous extrayons plus de minéraux qu’à aucun autre moment de notre histoire (...). En dépit des discours sur l’intelligence artificielle, les objets interconnectés et la prise de contrôle imminente par les robots, nos sociétés n’ont, à bien des égards, pas évolué par rapport aux pratiques du passé, lorsque la soif de pétrole a poussé les Européens à se partager le Moyen-Orient » (Sanderson, 2022).
Promesse d’un monde à venir « décarboné », enfin débarrassé de sa dépendance aux combustibles fossiles, la transition énergétique est en marche. Nouveau consensus, assumé par les États et l’ensemble des acteurs économiques, y compris par les géants du pétrole, elle est de tous les débats internationaux et oriente désormais toutes les politiques énergétiques et de relance, du Green New Deal états-unien au Pacte vert européen, en passant par les différents programmes nationaux de verdissement des économies. Dernière utopie, elle permettrait à l’humanité de s’affranchir des tensions, des conflits et des crises associés à l’addiction au pétrole.
Parés de toutes les vertus, ses vecteurs, les technologies bas carbone, les greentechs, nous libéreraient de la dépendance à la matière, en offrant une source inépuisable d’énergie. Étroitement associés aux technologies numériques, ils permettraient de réduire notre empreinte physique sur le vivant. Génératrice d’emplois et de croissance, la transition énergétique serait, enfin, la solution miracle pour revitaliser des économies capitalistes à bout de souffle.

Or, loin d’être aussi propre et vertueuse que le veulent ses prophètes, cette mise au vert des économies réclame, pour se déployer et pour rencontrer les objectifs qui lui sont assignés en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, des quantités faramineuses, et bientôt exponentielles, de métaux dits « rares », « critiques » ou encore « stratégiques ». Ainsi, d’après l’Agence internationale de l’énergie, les efforts nécessaires pour atteindre les objectifs de Paris, à savoir la stabilisation du climat au-dessous des deux degrés, devrait se traduire par un quadruplement de la demande en minéraux pour satisfaire les besoins de l’industrie des technologies « vertes ». Et même par la multiplication par six de cette demande pour atteindre la neutralité carbone en 2050 (2021).
D’ici là, la demande européenne en lithium, en cobalt et en nickel, matériaux indispensables à l’électromobilité et au stockage des énergies, devrait augmenter respectivement de 3535%, 331% et 103%. Et celle du cuivre et de l’aluminium, de 35% et 33% (KULeuven, 2022). Quant à la demande en terres rares qui rentrent, entre autres, dans la fabrication des turbines des éoliennes et des panneaux des parcs solaires, elle devrait être multipliée par cinq d’ici 2030. D’après une étude de la Banque mondiale, ce sont ainsi plus de 3 milliards de tonnes de dix-sept métaux et minéraux considérés comme « essentiels » qui devront être extraits du sol en l’espace d’un quart de siècle pour assurer le verdissement des économies, couvrir la hausse prévisible des besoins en énergie « propre » (éolien, géothermie, panneaux solaires, etc.) et maintenir la hausse des températures sous la barre des deux degrés (Hund et al, 2020). Et beaucoup plus encore, si l’on considère les besoins des autres industries et la demande pour d’autres matériaux.
« La conclusion est aberrante », écrit Guillaume Pitron. « Puisque la consommation mondiale de métaux croît à un rythme de 3 à 5% par an, ‘pour satisfaire les besoins mondiaux d’ici à 2050, nous devrons extraire du sous-sol plus de métaux que l’humanité n’en a extrait depuis son origine’ (...) nous allons consommer davantage de minerais durant la prochaine génération qu’au cours des cinq cents générations qui nous ont précédés » (2019). Pour maintenir la cadence, il faudra donc creuser davantage. Il faudra surtout ouvrir de nouvelles mines à un rythme jamais vu jusqu’ici.

Qu’on se le dise, la « transition verte » voulue, célébrée, annoncée, planifiée et inscrite dans les plans d’action des États, groupes d’État et organismes internationaux est une transition « matériellement intensive ». Dissipant l’illusion « dématérialisante » d’un accès illimité à une énergie dite « durable », elle est complètement tributaire des métaux, à l’instar des technologies numériques les plus avancées. Ce que Guillaume Pitron (2019) n’hésite pas à qualifier de « plus grande opération de greenwashing de l’histoire » ne fait en réalité que substituer une addiction à une autre.
La société de consultance McKinsey le reconnaît sans fard : « [ces] matières premières seront au centre des efforts de décarbonisation et d’électrification de l’économie au fur et à mesure que l’on s’éloigne des carburants fossiles » (2022). Dans cette future économie décarbonée, les métaux joueront un rôle tout aussi important que le charbon au 19e siècle et le pétrole au 20e siècle. Et McKinsey d’appeler les entreprises et les États à prendre au plus vite les devants pour tirer profit de cette « nouvelle révolution industrielle » (Ibid.).
Dans un contexte marqué par de fortes tensions géopolitiques, exacerbées par l’agression russe de l’Ukraine, de croissantes rivalités entre États et par la flambée du prix des matières premières, la sécurisation des approvisionnements en métaux de la transition est devenue un enjeu géostratégique majeur, sans doute aussi important que le pétrole au 20e siècle. Relançant la compétition entre États, cette récente addiction aux métaux provoque un nouveau « rush » sur les ressources minérales des pays du Sud, redevenus théâtre d’affrontement entre grandes puissances énergétiques.
Dans cette course, la Chine a pris une bonne longueur d’avance. Leader mondial des technologies vertes, assurant à elle seule le raffinage de 90% des terres rares, de 70% du cobalt et de 60% du lithium dans le monde, contrôlant d’un bout à l’autre plusieurs des principales chaînes d’approvisionnement et de transformation des batteries et de l’industrie des technologies bas carbone, à la faveur d’une politique d’industrialisation volontariste, elle tend depuis une vingtaine d’années à délocaliser son industrie minière, faisant main basse sur de nombreux gisements en Afrique, en Amérique latine, en Asie et en Océanie (Pitron, 2019 ; Sanderson, 2022 ; Zacharie, 2023).
Les géants miniers européens et états-uniens ne sont cependant plus en reste. S’étant déjà appropriés d’importants gisements mondiaux, ils entendent eux aussi tirer profit du boom des greentechs et de l’électromobilité, en relançant leur stratégie d’expansion dans le Sud. Et ils y sont désormais encouragés par les gouvernements de leur pays d’origine, terrifiés à l’idée de perdre la course aux énergies vertes. .../...


______________________________________________

Sortir de l’extractivisme, un projet de société
Par Gwenvaël Delanoë ; numéro 445, mai 2016 : Extraction minière, ni ici, ni ailleurs

revuesilence.net/numeros/445-Extraction-miniere-ni-ici-ni-ailleurs/sortir-de-l-extractivisme-un-projet-de-societe

[*Gwenvaël Delanoë : est un journaliste, membre du comité éditorial et cofondateur du média d'investigation breton Splann!. L'objectif de ce média aspire à être un lanceur d'alerte, avec des enquêtes destinées à provoquer des changements dans la société civile et à influencer les prises de position politiques. Il se veut complémentaire à la presse quotidienne régionale, et, a pour ambition d’éclairer les enjeux importants en Bretagne, notamment dans les domaines de l’agroalimentaire et de l’environnement. Gwenvaël Delanoë est également réalisateur du documentaire "Le syndicalisme pour changer la société", qui aborde les luttes syndicales et la répression des mouvements sociaux. Il propose des enquêtes accessibles gratuitement pour maximiser la circulation de l'information et inciter à des changements sociétaux. De ce fait Gwenvaël Delanoë se positionne donc comme un acteur clé dans le paysage médiatique breton, avec un fort engagement pour la transparence et l'investigation.]

Destruction massive de l’environnement, épuisement des ressources, dégradation des conditions de vie des populations locales, exploitation des travailleurs… L’extractivisme, base physique de la société de consommation, a des impacts dévastateurs. Voici quelques pistes de réflexion pour en sortir.

"Extractivisme". Derrière ce terme se cache la logique de pillages outranciers des ressources naturelles et humaines. Pillages érigés en piliers de notre mode de vie consumériste. Plusieurs définitions existent. Selon la journaliste Anna Bednik, "c’est l’intensification de l’exploitation industrielle de la nature, sous toutes ses formes" : l’extraction d’hydrocarbures et de minerais, mais aussi l’agriculture industrielle, les monocultures forestières, la pêche intensive, les grands barrages hydroélectriques… L’extractivisme est une base sans laquelle il serait impossible de poursuivre la croissance économique et d’assouvir des besoins toujours plus forts —notamment en technologies high-tech. Mais comment sortir de cette logique en pleine expansion ?

Plétore de fausses bonnes solutions
Parmi les solutions en vogue chez les grands pontes du capitalisme se trouve le "découplage". Anna Bednik explique : "Un certain nombre d’institutions internationales (…) affirment qu’il est possible de produire plus de marchandises avec moins de ressources naturelles et moins de pollution." De même, il serait possible de croître plus en consommant moins (c’est l’idée d’une ”dématérialisation de la croissance”). Cette vision, qui évite toute remise en cause du capitalisme, repose notamment sur le postulat qu’avec l’avènement de l’économie du numérique, la croissance pourrait se poursuivre grâce à des échanges virtuels. "Cette impression ne repose sur aucun fait réel et la promesse est mensongère. Notre société ’de la connaissance et de l’information’ est loin de se nourrir seulement de matière grise. Elle ingurgite essentiellement des produits et des services (…) qui nécessitent, pour voir le jour et être mis sur le marché, des infrastructures et des machines complexes, elles-mêmes fabriquées et animées grâce aux matières premières."
Dans la famille des fausses bonnes solutions, on retrouve bien sûr l’oxymore du "développement durable" et de sa quête d’une "croissance verte". "La poursuite de la croissance économique est incompatible avec la décroissance de la pression extractive (réduction en termes absolus de notre consommation des ressources naturelles), donc y chercher une sortie de l’extractivisme n’a aucun sens", résume la journaliste. Quant aux énergies renouvelables développées à échelle industrielle, Nicolas Sersiron et Robin Delobel incitent à prendre du recul : "Inutile autant qu’impossible de construire des éoliennes si c’est pour consommer toujours plus. Il faut des ressources métalliques énormes pour fabriquer une grande éolienne : 1 tonne de cuivre et 500 kg d’aimants de néodyme, un des métaux contenus dans les terres rares. Il en va de même pour les panneaux solaires qui nécessitent argent, cuivre, silicium, plastique et terres rares."

Du recyclage à l’écoconception
Notre appétit vorace pour l’équipement électrique et électronique (EEE) consomme une quantité astronomique de métaux rares. D’autant plus que le gaspillage est énorme. Camille Lecomte, des Amis de la Terre, s’est penchée sur la question du recyclage de ces produits : "Chaque année, en France, un habitant produit entre 17 et 21 kg de déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE). (…) Les taux de collecte des DEEE restent bas, les taux de recyclage aussi : seuls 20 % du gisement de DEEE sont recyclés. Actuellement, 17 métaux sont recyclés en France alors qu’un Smartphone en contient plus de 40." Mais le recyclage de ces "mines urbaines" est complexe, et la filière, qui pourrait être une nouvelle manne économique, demeure dépendante des cours du marché.
Aussi la réduction des déchets est-elle primordiale. Pour cela, il s’agit d’abord d’allonger la durée de vie des produits en luttant contre l’obsolescence programmée, et "ne pas céder aux appels des stratégies marketing des entreprises". Bref, réparer et réemployer plutôt que jeter ! Et pour faciliter le recyclage des EEE, Camille Lecomte prône le principe de l’écoconception : cela consiste à s’interroger, dès la fabrication des produits, sur leur recyclage après leur fin de vie, en les rendant aisément démontables et réparables.

Redéfinir nos besoins
Recycler les technologies high-tech ne suffit pas pour réduire notre dépendance aux industries minières. Les "low tech", décrites par Philippe Bihouix, sont une possibilité enthousiasmante (voir Silence no 441). Plus simples, plus robustes, ces produits réduiraient considérablement les déchets et les besoins en terres rares. Mais leur développement implique de changer nos habitudes… Il faudrait supprimer certains besoins superflus et réduire notre consommation de biens et de services. En les mutualisant, par exemple. Enfin, pour les besoins jugés incompressibles, il faudrait chercher à les satisfaire en utilisant le moins de ressources possible. Relocalisations, low-tech, énergies renouvelables à petite échelle, standardisation des produits… Les outils sont multiples !
"La demande d’objets et de services expressément créée pour vendre (…) n’a plus grand-chose à voir avec le sens commun du mot ’besoin’, à savoir une situation de manque", décrypte Anna Bednik. Nous pourrions demander "s’ils nous rendent plus heureux et plus libres ou, au contraire, nous emprisonnent. (…) Si l’utilité des choses devait être jugée, par exemple, à leur faculté d’accroître notre autonomie, une grande majorité des ’auxiliaires de vie’ qui saturent nos quotidiens seraient considérés non seulement comme inutiles mais comme nocifs, car ils se rendent indispensables en satisfaisant et en naturalisant une armada de besoins nouveaux, créés pour vendre, auxquels nous ne pouvons répondre nous-mêmes."
.../...
"Ce qu’il faut, c’est une rupture avec le capitalisme et plus largement avec le productivisme, une sortie de leur ’gouvernance’ économique et politique (…), poursuit Anna Bednik. Je pense que cela passe nécessairement par la pression à la base, par les résistances et par l’adhésion du plus grand nombre aux modes de vie alternatifs, par l’expérimentation qui n’attend pas que la solution vienne d’en haut, et par la défense du droit de continuer à expérimenter, de produire, de nous organiser, de penser de façon autonome, en dehors du cadre imposé par le système dominant." .../...








sommaire_1


Article 2

Envoi personnel du 21/10/2024 d'un article par Yaressua DNOMYAR
Site : prosea.fr






Carte du partage de la Palestine mandataire par l'ONU en 1947.

Image symbolique de la disparition tragique d'enfants...


LÀ-BAS EN ISRAËL
 
 
 

Comment se départir du jugement binaire de mes concitoyens à l’heure où j’essaie de comprendre ce qu’il se passe en Israël et sur la bande de Gaza ? C’est une acrobatie quasiment impossible. On est pour les Israéliens ou pour les Palestiniens. Un peu étriqué comme approche, aussi étriquée que la bande de Gaza ! On ne peut pas être pour ou contre l’un des deux sans se faire taxer d’islamophobe et/ou d’antisémite… Un peu dur pour un athée de mon espèce. Normalement, je laisse les religions de côté, n’ayant aucun parti pris à prendre pour l’une d’entre elles. Et ce n’est pas parce que je n’ai pas la foi que je n’ai pas d’opinion sur des sujets qui frôlent ou pataugent en plein dedans. Il ne faut pas se méprendre, la barbarie actuelle déployée par Israël à la suite de cet acte de barbarie du Hamas à l’encontre d’Israélien(ne)s civil(e)s le 7 octobre 2023, participe forcément de ce processus particulier qu’est, cette sensation inexplicable que les religions désignent par la foi.

Ceci étant avancé, on ne peut se satisfaire d’en déduire que la foi est à l’origine de ces évènements. Ni la culture manifestement différente des deux peuples, même si elle y contribue. Il faut plutôt aller chercher du côté de l’historique de la naissance de l’Etat d’Israël. Je ne vais pas développer l’intégralité du processus, mais quelques grandes dates méritent d’être soulignées avant d’aborder le sujet sensible du sentiment du retour de la communauté juive en Terre Sainte.

A la fin de 1947, l’Organisation des Nations Unies (ONU) « distribue » une portion d’une terre qui était sous mandat britannique, la Palestine (appelée la Palestine mandataire). Cette terre est habitée par des Arabes: plus d’un million, des Juifs: environ 600.000 et des chrétiens pour 150.000. Les Juifs étaient dix fois moins nombreux au début du siècle dernier mais les nombreux achats de terres effectués par la communauté juive auprès des Britanniques qui avaient mandat sur ce territoire, explique la progression importante de leur présence, autant que l’impact de la seconde guerre mondiale et son lot de persécution de cette communauté.
 
Dès 1948, les Arabes qui rêvent d’un Etat arabe sur toute la Palestine entrent en conflit armé avec la jeune Israël qui finit par sortir victorieuse des combats et en profite pour annexer 25% de territoires supplémentaires par rapport à ce qui avait été attribué par l’ONU au moment du partage.
Ensuite, ce sont de multiples conflits, larvés ou ouverts et armés, avec parfois de multiples pays arabes contre l’Etat Israélien encore très jeune.

C’est ainsi qu’en 1967 éclate la guerre des six-jours. Israël déclare les hostilités à la suite de la fermeture du détroit de Tiran par Nasser (Egypte) interdisant aux Israéliens l’accès à la mer Rouge et par suite à l’ensemble des mers.
L'Égypte, la Jordanie et la Syrie se trouvent engagées dans le conflit mais sont rapidement défaites au bout de six jours. Israël « confisquera » des grands pans de territoires dont certains n’ont jamais été restitués, la majeure partie de la Cisjordanie est toujours occupée, et la bande de Gaza reste depuis 2005 enfermée entre les territoires d’Israël, de l’Egypte et l’embargo maritime et aérien. D’un point de vue légal, ces territoires annexés par Israël sont toujours considérés comme une occupation illégale selon le droit international.

Puis en octobre 1973, la guerre du Kippour éclate. Une guerre qui impactera grandement, par ses suites économiques, l’ensemble des économies occidentales. Sont concernés par ce conflit, Israël face à une grande partie des pays arabes, l’Egypte qui déclenche les hostilités et la Syrie en premier lieu, puis sous formes diverses (matériel, contingent, etc. …), l’Arabie Saoudite, le Koweït, timidement la Jordanie, et plus symboliquement, les, Maroc, Algérie, Tunisie, Libye, Pakistan… La fin du conflit et les accords de Camp David (avec la reconnaissance d’Israël par le premier pays [culturellement] "arabe") n’ont guère changé la donne, le découpage de la Palestine reste le même avec ses annexions (Gaza et Cisjordanie). On peut considérer qu’Israël a réussi à s’imposer militairement malgré d’énormes revers initiaux. Elle peut vivre sans craindre d’être anéantie par les forces hostiles qui l’entourent… Mais.

Oui, il y a un mais, ces craintes évaporées ont laissé place à une incertitude permanente. Israël ne vit plus en guerre avec ses voisins, mais elle n’est pourtant pas en état de paix si l’on considère que sa population vit toujours avec le risque larvé d’attaques permanentes, venues de groupes islamistes, armés (Hamas, Hezbollah…) ou de la population palestinienne elle-même (Intifadas) qui provoquent en réaction de violentes répressions de la part de l’armée israélienne.

Toutes les tentatives de réelle paix ont clairement échoué, elles n’ont abouti le plus souvent qu’à des répits de courte durée. La faute à la gourmandise inadmissible de l’Etat d’Israël sur les territoires occupés (colonies illégales israéliennes encore aujourd’hui au regard des résolutions multiples de l’ONU non respectées, appliquées par l’Etat d’Israël, expropriations illicites, arrestations et détentions arbitraires contre les palestiniens, etc. …). La faute à des attaques permanentes d’individus ou groupes armés palestiniens contre des intérêts ou des citoyens israéliens. La faute à des pogroms (j’utilise le mot à dessein, devant l’absence de réaction du gouvernement ou de l’armée) fomentés par des colons israéliens contre la population palestinienne. La faute aux puissances étrangères qui arment les belligérants plutôt que de leur imposer une solution de paix. La faute au refus de toutes parts (des Israéliens et des Palestiniens, quoiqu’ils en disent, d’une solution à deux Etats autonomes sur la base des contours de 1947 définis par la résolution 181 de l’ONU. La faute aux extrémistes des deux camps dont chacun verrait d’un bon œil l’annihilation de l’autre camp au plus grand mépris des droits humanitaires… La faute à tant de choses qu’il faudrait un livre de la taille d’un Bottin pour en inventorier l’entièreté.

Je ne vais pas refaire l’article, d’autant que mes connaissances sont assez lacunaires. Je vous invite à consulter les livres d’Histoire sur l’antiquité. Mais historiquement, les Juifs ont des droits sur les terres d’Israël et Jérusalem autant que les Arabes des anciens pays ottomans.

Les Juifs ont eux été très souvent l’objet de persécutions, d’expulsion et plus récemment de tentatives d’annihilation (la Shoah). Leurs fuites incessantes devant la violence de l’adversité en ont fait dans l’Histoire un peuple plutôt nomade aux capacités d’adaptation assez phénoménales et à l’entraide jamais démentie par la diaspora juive. L’idée d’un retour « aux Terres ancestrales » et plus généralement l’idée d’être citoyen d’un Etat à part entière est très ancienne avec le plus souvent Jérusalem comme point central. L’ensemble des Juifs, d’Amérique du Nord à la Russie en passant par l’Orient, ont partagé ce rêve et dès le début du XXème siècle ont contribué à l’achat de terres en Palestine, sans que ces achats ne confèrent le statut d’Etat à ces territoires acquis. Qui pourrait contester ce rêve ? Qui pourrait le contester à un peuple en errance, intriqué par une religion et par-delà une culture aux accents communs ; auquel il ne manque qu’une langue commune, perdue depuis des siècles et des siècles de dispersion dans le monde ? Qui pourrait s’offusquer qu’un bout de Terre lui ait été attribué après l’horreur du génocide commis par les Allemands à son encontre ?

La réponse est : les Arabes et plus spécifiquement ceux qui étaient concernés par la scission de leurs terres, en application de la résolution 181 des Nations Unies, à eux aussi ancestrales.

Et peut-on leur en tenir grief ?

Du concept de droit des peuples à disposer de lui-même visé dans la résolution 637 de l’ONU, on ne tire malheureusement pas la substantifique moelle qui permettrait de considérer immédiatement que dès sa création l’Etat d’Israël a été créé en violation des règles internationales du moment. C’est sans doute pour cela d’ailleurs que malgré les résolutions 3210 – 3237 des Nations Unies, plus récentes (années 70), qui réaffirment ce droit, sont restées lettre morte. D’ailleurs, ne nous mentons pas sur le sujet, le statut du peuple palestinien n'en finit pas d'être remis en question. C’est au gré des alliances et des intérêts économiques et politiques de nombreuses nations qu’Israël se permet de repousser ad æternam la solution à deux Etats dont il n’est même pas question dans leur esprit.
[ Pour complément d'info et résumé, consulter ce bref document de l'ONU (en français) du 9 mai 2024 sur la légitimité de la cause palestinienne, "y compris son droit à un État de Palestine indépendant" ; confer:  documents.un.org/doc/undoc/ltd/n24/129/98/pdf/n2412998.pdf ]

Alors, tout aussi monstrueux que l’acte perpétré par des membres du Hamas (avec son aval, clairement) à l’encontre de civils israéliens, la riposte sanglante de Tsahal (la force de défense d’Israël) qui emporte des milliers de vies de Palestiniens dont un nombre incalculable d’enfants (ne vous reposez pas sur moi pour être le comptable macabre et fournir ici un inventaire des vies encore trop récentes) doit-être dénoncé et condamné avec la même fermeté. Je suis sans aucune religion autre que celle du chantre de la vie et de la paix des individus entre eux qui ne sont que de vulgaires terriens dans l’univers.

Comment, dans la tête des Palestiniens, membres du Hamas, a-t-il pu germer l’idée que pour faire entendre la cause palestinienne, il fallait tuer, violer et kidnapper sans vergogne ? Sans doute l’imbécillité et la rage de voir bafouer les droits des Palestiniens sans qu’aucune nation, en capacité d’infléchir la politique israélienne, ne réagisse autrement que par des discours de principe.

Comment, dans l’esprit des dirigeants israéliens a-t-il pu naître la croyance qu’à coup de bombes, de chars et autres instruments de mort, la solution était trouvée pour punir le Hamas (dont on peut rappeler que le premier ministre actuel Netanyahou se félicitait en son temps que ce parti [nationaliste et islamiste, considéré comme terroriste par la plupart des pays dits occidentaux] ait balayé le Fatah, [un autre parti nationaliste qui se déclare, lui, laïque], en terrorisant tout une population et en particulier des enfants (environ 40% des gazaouis ont moins de 14 ans !) ?

C’est clair, les uns et les autres sont enfouis dans leur hargne [contre] l’autre et qu’importe si un nombre incalculable de vies sont dans la balance puisqu’ils ne sont plus dans le pragmatisme, l’humanisme, la réalité, mais dans le cocon sclérosé de leur religion respective.

La Palestine et Israël vivront, au moins à un terme générationnel, en paix à la condition que deux Etats naissent de la terreur actuelle. Les Palestinien(ne)s et les Israélien(ne)s ne connaîtront la sécurité et la tranquillité qu’en admettant cette évidence niée par les deux parties. Israël doit-être reconnu comme un Etat par l’ensemble du monde arabe et Israël doit démarrer sans arrière pensée le processus de création d’un Etat palestinien aux frontières clairement définies, sous l’égide des Nations Unies.

Tout le reste n’est que littérature.


Yaressua DNOMYAR,
18/06/2024
Site : prosea.fr








sommaire_2


Article 3

 Envoi personnel du 30/12/2024 d'un article par Mazin QUMSIYEH
 Sites : palestinenature.org ; popular-resistance.blogspot.com






Photo de bombardement dans le sud de Gaza, le 6 décembre 2023.

Photo de Palestiniens veillant des morts.


STATISTIQUES EFFROYABLES CONCERNANT L'ENFER DE GAZA 
 
 
 


Source : popular-resistance.blogspot.com/2024/12/shocking-statistics.html

(Traduction affinée par JJ Pat REY)

Des statistiques absolument consternantes au 450ème jour consécutif s'agissant du génocide dans la Bande de Gaza.
Le Bureau des Médias du Gouvernement Palestinien a publié une mise à jour de statistiques des plus sérieuses (jugée crédible même par l'ONU, l'OMS et jusqu'aux USA).
LISEZ S'IL VOUS PLAÎT et faites savoir ce que les forces d'occupation israéliennes ont fait (avec l'argent des contribuables étasuniens et les munitions et des fournitures d'autres pays dans une moindre mesure):  

- 88 000 tonnes d'explosifs jetées sur la Bande de Gaza (plus que la quantité jetée sur le Viêt Nam et quatre fois la puissance de la bombe nucléaire à Hiroshima sur une région d'une superficie de 360 km2) [: une bande de terre de 41 km de long pour une largeur de six à douze kilomètres].

- 9 973 massacres commis (tuant beaucoup de gens en une seule fois par bombardement ou pilonnage ; dont 70 % de femmes et d'enfants).

- 56 714 personnes tuées et disparues: 45 514 parvenues dans des hôpitaux (dénombrement du ministère de la Santé [palestinien] ), 11 200 personnes disparues n'ont pas atteint les hôpitaux (encore sous les décombres ou des corps manquants). Les cas de celles tuées et documentés comprennent:
 * 1 413 familles entières palestiniennes anéanties (pas de membres survivants) tandis que 3 467 familles palestiniennes n'ont qu'un seul survivant, et le nombre des membres de ces familles est de 7 941 martyrs. (Ministère de la Santé);
 * 17 818 enfants tués (la plupart âgés de moins de 5 ans, 238 nourrissons sont nés et ont été tués pendant cette période de génocide);
 * 12 287 femmes tuées;
 * 1068 membres du personnel médical [tués] (ministère de la Santé);
 * 94 membres de la Défense civile / premiers intervenants et 728 policiers (civils) [tués];
 * 201 journalistes  [tués] (un nombre plus élevé que celui de ceux tués pendant la Seconde Guerre mondiale);
 * 520 corps exhumés de fosses communes sur le terrain des hôpitaux ciblés;

- Les nombres n'incluent pas le cas de ceux qui meurent du fait du manque de nourriture, de médicaments, de l'eau, de maladies ou du froid. Spécifiquement:
 + 44 enfants ont été dénombrés morts de faim, plusieurs centaines ne sont pas enregistrées;
 + Six nourrissons sont morts d'hypothermie dans des tentes, des centaines ne sont pas enregistrées;
 + Les données n'incluent pas les décès parmi les 12 500 patients atteints de cancer (en grande partie dus au manque de traitements);
 + Les données n'incluent pas les décès ou l'affaiblissement propre aux maladies infectieuses:
2 136 026 cas relatifs à ces maladies dus à des déplacements forcés dans des conditions insalubres, notamment en ce qui concerne l'hépatite, la polio, les maladies de la peau, les troubles pulmonaires, les troubles intestinaux (ministère de la Santé);
  + Les données n'incluent pas les décès ou les débilitations de patients atteints de maladies chroniques (350 000 patients tels que les diabétiques) en raison de l'occupation empêchant l'entrée de médicaments ou ne permettant pas un fonctionnement normal des installations comme dans le cas des dialyses rénales.

- 108 189 blessés et mutilés sont arrivés dans des hôpitaux, (dont 399 journalistes et professionnels des médias), 12 650 blessés avaient besoin de se déplacer pour leur traitement (Ministère de la Santé).

- 21 centres de déplacement (déclarés «zones sûres») ont été ciblés par les forces armées israéliennes (seulement 10% du territoire de la bande de Gaza est  proclamé "zones humanitaires'' par l'occupation israélienne).

- 35 060 enfants vivent sans leurs parents ou sans l'un d'eux (orphelins).

- 12 125 femmes ont perdu leur mari pendant la guerre génocidaire.

- Plus de 60 000 femmes enceintes manquent de soins de santé concernant OB/GYN [Gynécologie obstétrique] (risques).

- Près de 10 000 personnes ont été enlevées et incarcérées sans procès, dont 331 du personnel médical, 43 des médias et 26 membres du personnel de la défense civile. Plus de 30 sont décédés sous la torture dans des prisons israéliennes (3 membres du personnel médical exécutés en prison par des moyens de torture).

- 2 millions de personnes sont déplacées dans la bande de Gaza. 110 000 tentes sont usées et deviennent impropres aux déplacés.

-Les infrastructures, y compris la plupart des bâtiments, ont été détruites intentionnellement (dans la plupart des cas après que l’infanterie israélienne les ait occupées). Cela comprend:

*135 écoles et universités complètement détruites et 353 écoles et universités partiellement détruites (12 780 étudiants ont été tués pendant la guerre) : 756 enseignants et employés de l’éducation ont été tués par les forces d’occupation pendant la guerre ; 148 scientifiques, universitaires: professeurs d’université et chercheurs ont été exécutés sous l’occupation ; 785 000 étudiants ont été privés d’éducation par l’occupation israélienne.
 * 823 mosquées ont été complètement détruites et 158 mosquées ont été gravement endommagées par les occupants et ont besoin d'être restaurées;
 * 3 églises prises pour cible et détruites;
 * 19 cimetières ont été complètement ou partiellement détruits par l’occupation sur 60 cimetières. 2 300 corps ont été volés par l’occupation dans plusieurs cimetières de la bande de Gaza;
 * 161 600 logements entièrement détruits et 194 000 logements partiellement détruits;
 * 162 établissements de santé ciblés par l’occupation (la plupart des cliniques et hôpitaux sont détruits et/ou mis hors service);
 * 136 ambulances ciblées;
 * 213 bâtiments officiels;
 * 206 sites archéologiques et patrimoniaux;
 * 3 130 kilomètres de réseaux électriques;
 * 125 Emplacements de transformateurs souterrains de distribution d’électricité détruits;
 * 330 kilomètres de réseaux d’eau détruits;
 * 655 kilomètres de réseaux d’assainissement détruits;
 * 2 835 kilomètres de routes et de réseaux urbains détruits;
 * 42 installations communautaires, terrains de jeux et salles de sport détruits;
 * 717 puits d’eau détruits par l’occupation et mis hors service;
 * Cela représente un taux de destruction de 86 % dans la bande de Gaza. Le choc initial de la guerre génocidaire représentent des pertes économiques, directes, de l'ordre de 37 milliards de dollars.

Tout cela n'inclut pas les dommages causés à l'environnement, une partie d'entre eux sont irrémédiables, et quelques zones à Gaza sont maintenant inhabitables pour des décennies à venir…. Voir des articles à ce propos comme celui-ci :

===============

De toute façon, les États-Unis continuent d'envoyer des armes:

Les responsables de l'UE argueront de l'ignorance des crimes de guerre commis par Israël. Ce document divulgué montre ce qu'ils savaient:



Mazin QUMSIYEH


____________________________________________________________


VERSION ORIGINELLE EN ANGLAIS



SHOCKING STATISTICS



Shocking statistics on the 450th consecutive day of the genocide on the Gaza Strip.
The Palestinian Government Media Office published an update on the most important statistics (deemed reliable even by the UN, WHO and even USA).
PLEASE READ and disseminate that Israeli occupation forces (with US tax money and munitions and to a lesser extent other countries) did this:

- Dropped 88,000 tons of explosives on the Gaza Strip (more than dropped on Vietnam, and four times the explosive power of a Hiroshima-size nuclear bomb in an area of a mere 360 sq km or 250 square mile)

- Committed 9,973 massacres (killing many people at one time by bombing or shelling; 70% women and children)

- 56,714 killed and missing persons: 45,514 reached hospitals (Ministry of Health recorded), 11,200 missing persons did not reach hospitals (under rubble or bodies missing). Those killed and documented include:
 *1,413 Palestinian whole families gone (no surviving members) while 3,467 Palestinian families had only one surviving family member, and the number of members of these families is 7,941 martyrs. (Ministry of Health).
 *17,818 children killed (most under age of 5 years, 238 infants were born and killed in the period of the genocide).
 *12,287 women killed
 *1068 from the medical staff (Ministry of Health).
 *94 civil defense/first responders and 728 police officers (civil)
 *201 journalists (higher than those killed in WWII)
 *520 exhumed from seven mass graves on grounds of targeted hospitals.

-The numbers do not include those dying from lack of food, medicine, water, from diseases and from cold. Specifically:
 + 44 children were recorded starved to death, many hundreds are not recorded
 + Six infants died from hypothermia in tents, many hundreds are not recorded
 + Data do not include deaths among the 12,500 cancer patients (largely lacking treatments)
 + Data do not include deaths or debilitation from infectious diseases:
2,136,026 cases of such diseases due to displacement forcing unsanitary conditions including hepatitis, polio, skin diseases, lung disorders, intestinal disorders (Ministry of Health)
  + Data do not include deaths or debilitation from chronic disease patients (350,000 patients such as diabetes) due to the occupation preventing the entry of medicines or allowing operation of facilities like kidney dialysis

- 108,189 wounded and injured arrived at hospitals including 399 journalists and media professionals), 12,650 wounded need to travel abroad for treatment. (Ministry of Health)

-21 displacement centers (declared “safe zones”) targeted by the Israeli occupation (only 10% of the area of the Gaza Strip is claimed by the Israeli occupation to be "humanitarian areas")

-35,060 children live without their parents or without one of them (orphans).

-12,125 women lost their husbands during the genocidal war.

- More than 60,000 pregnant women lack of OB/GYN healthcare (risk)

- Nearly 10,000 were abducted and incarcerated without trial including 331 medical, 43 media, and 26 civil defense personnel. Over 30 died under torture in Israeli prisons (3 medical personnel executed in prison by torture)

- 2 million displaced people in the Gaza Strip. 110,000 tents were worn out and became unfit for the displaced.

-Infrastructure including most buildings were destroyed intentionally (in most cases after Israeli infantry occupied them). This includes

*135 schools and universities completely and 353 schools and universities partially destroyed (12,780 students were killed during the war): 756 teachers and educational employees in the education sector were killed by the occupation during the war. 148 scientists, academics, university professors and researchers were executed by the occupation. 785,000 students were deprived of education by the Israeli occupation.
 * 823 mosques were completely destroyed and 158 mosques were severely destroyed by the occupation and need to be restored.
 * 3 churches targeted and destroyed.
 * 19 cemeteries were completely or partially destroyed by the occupation out of 60 cemeteries. 2,300 bodies were stolen by the occupation from several cemeteries in the Gaza Strip.
 * 161,600 housing units completely destroyed and 194,000 housing units are partially destroyed
 * 162 health care facilities targeted by the occupation (most clinics and hospitals destroyed and/or rendered out of service).
 * 136 ambulances targeted
 * 213 government civil headquarters
 * 206 archaeological and heritage sites.
 * 3,130 kilometers of electricity networks.
 * 125 number of underground electricity distribution transformers destroyed.
 * 330 kilometers of water networks destroyed.
 * 655 kilometers of sewage networks destroyed.
*2,835 kilometers of road and street networks destroyed.
*42 community facilities, playgrounds and sports halls destroyed.
*717 water wells destroyed by the occupation and put out of service.
*This is 86% destruction rate in the Gaza Strip. $37 billion is the initial direct economic losses of the genocide war

This does not include the environmental damage; some of it not repairable and some areas of Gaza are now uninhabitable for decades to come…. See our research papers on this such as this one:
palestinenature.org/research/Impact-of-the-Israeli-military-activities-on-the-environment.pdf

===============

U.S. to continue sending weapons anyway
nbcnews.com/news/world/gaza-aid-entering-israel-us-deadline-rcna176737
.../...
EU Officials Will Claim Ignorance of Israel’s War Crimes. This Leaked Document Shows What They Knew:
theintercept.com/2024/12/23/eu-report-israel-war-crimes-complicity/



Mazin QUMSIYEH
qumsiyeh.org/
palestinenature.org/
popular-resistance.blogspot.com/
(A bedouin in cyberspace, a villager at home
Professor, Founder, and (volunteer) Director
Palestine Museum of Natural History
Palestine Institute of Biodiversity and Sustainability
Bethlehem University
Occupied Palestine)








sommaire_3


Article 4

Envoi personnel du 22/01/2025 d'un article par SOS Racisme
Site : sos-racisme.org






Image d'art et symbole de résistance par femme palestinienne émergeant de la destruction de cité.

Image symbolique de gens derrière barbelés réclamant la Paix.


FIASCO MORAL, QUID DE LA PAIX EN PALESTINE ?
 
 
Tribune
« Entre Israël et le Hamas, la paix à tombeau ouvert »

par Dominique Sopo

 

Paris, le 22 janvier 2025.

Maintenant que les armes se sont tues, au moins provisoirement, à Gaza, il est temps pour les Israéliens et les Palestiniens de s’interroger sur les moyens de sortir enfin de la spirale de violence qui les oppose. Quant aux pays occidentaux, ils seraient bien avisés de méditer aussi sur leurs réactions à cette crise, écrit le président de l’association française SOS Racisme.
___________________________________________


Depuis quelques heures, une trêve entre Israël et le Hamas a mis provisoirement un terme à l’enfer vécu par les Palestiniens à Gaza depuis 15 mois de bombardements dévastateurs. Cette trêve permet également la libération d’otages capturés par le Hamas lors de sa sanglante attaque terroriste commise le 7 octobre 2023 en Israël.

Bien évidemment, ce qui prime en premier, c’est le soulagement de voir les armes se taire, les compteurs macabres du nombre de morts à Gaza cesser de gonfler jour après jour, des familles d’Israël et d’ailleurs retrouver l’un ou plusieurs des leurs détenus par le Hamas depuis plus d’un an, des familles palestiniennes retrouver l’un ou plusieurs des leurs détenus dans les prisons israéliennes et qui, quoi qu’en disent celles et ceux qui sont prompts à les qualifier en bloc de « terroristes », n’avaient pour certains d’entre eux rien à faire en prison.

Alors que ce qui se déroule sous nos yeux correspond aux grandes lignes du plan élaboré par Biden en mai dernier, on ne peut que méditer sur ces 8 mois de bombardements supplémentaires perpétrés par l’armée israélienne et sur ces 8 mois de souffrances supplémentaires pour les otages.

De même, on ne peut que méditer sur le bilan effroyable de cette séquence du long conflit israélo-palestinien ouverte par le 7 octobre 2023 : une attaque inédite du Hamas qui a causé la mort de 1200 personnes en Israël, des représailles israéliennes insensées qui ont dévasté Gaza et ôté la vie à plusieurs dizaines de milliers des habitants de ce territoire.

Sur la base de ce bilan qu’il faudrait notamment compléter par l’accentuation de la colonisation en Cisjordanie, par le calvaire subi par de nombreux otages ou par la quasi-famine qui a frappé Gaza par la volonté évidente du gouvernement d’extrême-droite dirigé par Netanyahou, on ne peut que méditer sur le fait que ce sont les civils qui ont payé l’essentiel du tribut de cette longue phase sanglante.

On ne peut que méditer sur le discrédit moral dans lequel Netanyahou, inculpé par la CPI pour crimes de guerre et crimes contre l’Humanité, a entraîné son pays qui, naguère, s’enorgueillissait de la supériorité morale que lui conférait son statut d’Etat de droit au sein d’une région aux régimes fort peu démocratiques.

On ne peut que méditer sur la somme de traumatismes, de haines et de volonté de vengeances que cette séquence a produite et produira.

On ne peut que méditer sur l’incapacité qu’ont eu de nombreux acteurs, dans notre pays et ailleurs, à exprimer de l’empathie pour les victimes du 7 octobre 2023, à qualifier négativement le Hamas (dont le projet est de mettre en œuvre un projet théocratique et de détruire Israël…) et à exprimer le moindre soutien aux Français juifs saisis par la montée des actes antisémites.

On ne peut que méditer sur l’incapacité qu’ont eu de non moins nombreux acteurs dans notre pays et ailleurs à exprimer de l’empathie pour les victimes civiles gazaouies, à base de racisme mal camouflé et d’ergotages sur le nombre réel de victimes des bombardements de Tsahal.

Ayant la chance de ne pas être plongés dans le chaudron de la peur, de la mort, des passions et des haines qu’est devenue cette région ces derniers mois, nous avons la responsabilité d’œuvrer à la paix, à la justice et au dialogue. Et non d’ajouter une couche de hainesur fond de racisme antiarabe ou d’antisémitisme – aux haines qui consument les corps et les esprits là-bas.

Alors que les armes se sont tues pendant une phase qui doit durer 42 jours, nous ne pouvons qu’espérer qu’un processus politique permettra enfin de faire émerger un Etat palestinien aux côtés d’un Etat d’Israël universellement reconnu.

Pour cela, espérons que les acteurs de ce drame seront écartés de la scène : l’extrême-droite israélienne évidemment qui n’a à offrir aux Palestiniens que la haine, le mépris et le suprémacisme juif. Mais également le Hamas – autre forme d’extrême-droite – qui a pour point commun avec l’extrême-droite israélienne de penser que la solution au conflit ne passe pas par le partage de la terre mais par l’éradication de la partie adverse.

Pour les Palestiniens, une question stratégique mais néanmoins existentielle se pose : comment faire émerger un leadership en situation de mener la lutte nationaliste et de se présenter comme l’interlocuteur de futures négociations ?

Pour les Israéliens, une réflexion éthique et donc nécessairement existentielle se pose : quelle responsabilité découle de la supériorité militaire d’Israël qui, agie par l’extrême-droite, a conduit à une destruction de vies civiles dans des proportions qui nous éloignent de toute justification par les inévitables « dommages collatéraux » de la guerre ? Partant, que faire de cette supériorité : en faire une fin en soi ou, dans une perspective politique depuis trop longtemps tuée par Netanyahou, en faire une force dans la négociation avec les Palestiniens ? 


Dominique SOPO
pour
SOS Racisme Touche pas à mon pote
51 avenue de Flandre , 75019, Paris

sos-racisme.org







sommaire-4


Article 5

Envoi personnel du 10/02/2025 d'un article par Hajar DRISSI pour WeMove Europe
Site : wemove.eu/fr






Photo de fonte des glaces au Groeland.

Image composée avec Trump au doigt comminatoire et carte punaisée du Groeland.


POUR LE GROENLAND ET CONTRE TRUMP
 
 
Protégeons le Groenland pour éviter que Trump ne s'en empare !
 


Source : action.wemove.eu/sign/2025-01-Stop-Trump-Greenland-petition-FR

Vous vous souvenez de cet enfant qui intimidait les autres dans la cour de récréation ? Celui qui poussait les autres, les menaçait et prenait ce qui ne lui appartenait pas - et ce jusqu'à ce qu'un nombre suffisant de personnes se dressent contre lui et lui disent « maintenant ça suffit ! ».

Aujourd'hui, cette personne est Donald Trump. Il met la pression sur le Danemark et tente de prendre le contrôle du Groenland afin de pouvoir exploiter ses précieuses ressources naturelles à des fins lucratives. Après un appel téléphonique qualifié « d'horrible » avec Donald Trump, le gouvernement danois s'est tourné vers l'Union européenne pour obtenir son soutien. Le Groenland résiste, mais il ne peut pas tenir seul.
C'est le moment pour nous d'intervenir. [Au matin du 16 février 2025, plus de 100 000] personnes ont déjà signé notre petition demandant à l'UE d'agir. Plus nous serons nombreux à nous exprimer, plus notre position sera forte.

Les intimidateurs reculent lorsqu'ils se rendent compte qu'ils sont en infériorité numérique. Montrons à Trump que nous ne resterons pas les bras croisés.
L'Arctique est en train de fondre - et si nous n'agissons pas, les droits de ses habitant·es fondront aussi.
[Oui!] L'Arctique fond, mais le véritable danger vient de ceux qui cherchent à l'exploiter à des fins de pouvoir et de profit. Nous devons empêcher Donald Trump de s'emparer du Groenland. Agissez maintenant pour protéger l'Arctique et ses habitants !

Donald Trump prétend que les Groenlandais veulent rejoindre les États-Unis, mais ils ont été très clairs : leur démocratie n'est pas à vendre. Pourtant, Donald Trump revient à la charge, menaçant l'autonomie du Groenland et faisant même allusion à l’utilisation de la force militaire pour s'emparer de cette île de l'Arctique riche en minerais.

Le Groenland est en état de siège: son indépendance, ses ressources et son environnement fragile sont en jeu.

Il ne s'agit pas seulement d'une insulte à la démocratie européenne, mais d'une menace directe envers le peuple groenlandais. Les communautés autochtones risquent de perdre leur démocratie en même temps que leurs territoires, qui regorgent de minerais rares et sont essentiels à la transition écologique. Le fragile écosystème arctique risque d'être détruit par les intentions égoïstes de Trump.
L'UE doit agir maintenant pour défendre la souveraineté du Groenland et l'avenir de l'Arctique.

Les dirigeant·es du Groenland lancent un appel à la solidarité, et nous devons y répondre. La responsable de la politique étrangère de l'UE s'est déjà engagée à apporter son soutien. Des pays comme la France, l'Allemagne et les pays nordiques se mobilisent pour assurer la sécurité dans l'Arctique. Mais la solidarité ne signifie rien sans action. Les paroles ne suffiront pas à protéger le Groenland.  

Il est temps de prendre des mesures audacieuses et fortes.

Exigez de l'UE qu'elle soit ferme : qu'elle défende la souveraineté du Groenland, qu'elle protège l'environnement fragile de l'Arctique et qu'elle préserve la démocratie dans toute l'Europe. Cet enjeu dépasse les frontières du Groenland.

Nous sommes confronté·es à une dangereuse alliance entre milliardaires et dirigeant·es autoritaires résolu·es à saper les valeurs démocratiques.
Donald Trump et son ami Elon Musk sont au centre de cette alliance. Elon Musk diffuse une rhétorique d'extrême droite sur "X", tandis que Trump cherche à annexer le Groenland, motivé par l'appât du gain des entreprises américaines. Ensemble, ils placent les profits au-dessus des personnes, de la souveraineté et de la planète.

Chez WeMove Europe, nous croyons au pouvoir du collectif pour riposter. Tout comme nous nous tenons aux côtés du Groenland, nous nous opposons déjà à Musk et à l'ingérence de Trump dans les élections libres et équitables.

L'avenir du Groenland appartient à son peuple.

L'UE doit soutenir les Groenlandais en favorisant la coopération, en promouvant le développement durable et en respectant leur autodétermination. Ensemble, nous pouvons mettre fin à toute forme d'exploitation, faire de l'Arctique une zone de paix et défendre nos démocraties contre ceux qui cherchent à les déstabiliser.

Les Groenlandais, menés par leur Premier ministre, ont clairement exprimé leur position : « Nous ne voulons pas être américains ». Il nous appartient désormais de les soutenir et de veiller à ce que leur avenir soit déterminé par leur peuple, et non imposé par des puissances étrangères.



Hajar DRISSI
pour WeMove Europe
"WeMove Europe est un mouvement qui mène des campagnes visant à renforcer le pouvoir citoyen
et à transformer l’Europe pour les citoyen·ne·s, les générations futures et la planète."








INTERNET-TRIBUNE-LIBRE_index-généralINTERNET-TRIBUNE-LIBRE_haut-pageINTERNET-TRIBUNE-LIBRE_archives-2025



Dernière modification : 17.02.25, 17:50:35