LE CASSE DU SIECLE ! -2013- Rien qu’à leur faciès et leur voix, l’expert, derrière son masque, savait qu’il avait affaire à des gangsters et certainement pas des seconds couteaux ou de simples emberlificoteurs… Ils imprégnaient la pièce d’une odeur puante qui n’était pas simplement due au tabac, mais à une crasse morale qui suintait par toutes les pores de leurs personnages, en gros plan costumés. Là, nous grimpions dans les étages de la malfaisance. L’expert était en présence de chefs maffieux probablement. Le petit truand de ses connaissances qui avait servi de guide et « Monsieur Loyal » s’éclipsa sur un claquement de doigts sitôt qu’il eût introduit l’invité, ça ne rigolait pas… Alors c’était donc cela, son futur, possible, club d’employeurs ? … Un des squales invita l’expert à s’asseoir. Il se retrouva à un bout de table, avec deux rangées de mufles patibulaires devant lui. Même une mouche aurait peiné à traverser l’air dans cette « herse »… Cela faisait une drôle d’atmosphère ! - Voilà, nous vous avons fait venir pour discuter d’un petit problème sur un projet que nous avons. Vous pourriez peut-être contribuer à le résoudre et nous vous en serions largement reconnaissant… « La reconnaissance, avec ces gens-là ? … A prendre avec des pincettes et avec quelles précautions ! » se dit l’expert. - Mais avant, nous allons vous faire voir quelque chose… * Au bout de table opposé où il n’y avait personne, l’expert vit descendre du plafond, un objet qui, une fois déployé, s’avéra être une console vidéo qu’un des gangsters mit en marche. - Regardez bien ! Quelle qu’en soit l’issue, vous serez édifié. L’expert regardait bien et même intrigué, derrière son masque. Il voyait un train immobilisé dans un tunnel faiblement éclairé, et, pour le moment, rien ne bougeait. … Soudain une voix métallique résonna, sortie de nulle part, et en tout cas envahit la pièce où l’expert était en compagnie de son « aréopage » de circonstance. - Votre train est immobilisé, il ne redémarrera pas. Toute résistance est vaine. Sortez de là, les mains en l’air, et il ne vous sera fait aucun mal ! Le train était composé de drôles de wagons qui ressemblaient à des engins blindés, de forme oblongue, relevée à chaque extrémité. Une minute passa sans réaction visible. Il n’y avait rien ni personne autour du train… - Je répète, vous êtes bloqués, sortez des wagons, les mains en l’air, sur le quai ! Nous avons le contrôle complet de la motrice qui reste à l’arrêt. Aucune échappatoire n’est possible, vos vies sont en danger. Sortez tout de suite ! Une minute passa encore et nulle réaction ne l’émailla : à se demander si l’avertissement avait été entendu… - Jamais deux sans trois : dernier avertissement ! Maintenant vous avez trente secondes pour sortir et sauver vos vies. Toute résistance est inutile. La suite surprit l’expert, bien qu’il s’attendit à une action violente et déterminée, une qui serait sans vergogne. Il vit surgir sur le quai des silhouettes ramassées, armées de tubes, qu’un gros plan lui révéla vite pour être des robots, sans doute prépositionnés dans les recoins du tunnel. Ils tirèrent des projectiles qui perforèrent les blindages, en libérant une légère fumée. L’expert comprit que des charges creuses avaient été employées, probablement pour permettre la dispersion d’agents chimiques, et il plaignit les occupants s’il y en avaient… - Maintenant ils sont morts, ces pauvres cons ! Ils croyaient que l’épaisseur de leurs boîtes les mettraient à l’abri de toute attaque, ils en sont pour leurs frais et transformés en pop-corn, ha ! ha ! Ensuite les robots firent sauter les portes et ils pénétrèrent dans les wagons… L’expert les vit ressortir rapidement avec des barres de métal et une noria s’enchaîna. Tels des fourmis portant leur fardeau, les robots sortaient du tunnel et y revenaient par une autre issue, le tout réglé comme un ballet. D’autres caméras prirent alors le relais, qui montraient les robots charger des camions, juste en contrebas du tunnel sur une route. - Pourquoi ces manutentions ? Est-ce vraiment nécessaire ? demanda l’expert. - Oui, on ne peut réutiliser le train ni un autre : le premier est contaminé, et les étatiques bloqueraient très vite les voies pour les autres, si d’aventure on en tenait un à merci. En amont et en aval, on ne contrôle que deux gares, momentanément et par surprise ; alors mieux vaut prendre la route où nous disposons de quelques avantages, vous allez voir… Et sur la route, tout gazait bien, les véhicules de transport, de toutes sortes, banalisés, se fondirent dans le décor, au sens propre et au sens figuré, repeints et maquillés en cours d’opération à vitesse grand V, dans des ateliers mobiles et prévus à l’avance, pour finalement abouler différents stocks, en différents entrepôts, différents endroits, et même sous une montagne, dans d’anciens silos pour armes atomiques, désaffectés et inutilisés sinon inutiles depuis. Une chose était sûre, les organisateurs de la « confiscation » ne manquaient ni de ressources ni de moyens. * On vivait des temps difficiles sur Terre. Après bien des conflits et l’excès en tout comme la surexploitation des ressources naturelles, les métaux étaient devenus rares. Ils faisaient l’objet d’un contrôle strict dans leur utilisation. Ils avaient évidemment pris beaucoup de valeur, aux yeux de beaucoup de gens, et le trafic illicite dont ils étaient l’objet, dépassait de loin celui de la drogue dès lors. Si bien que les gouvernements avaient mis au point des techniques de transport, sophistiquées, qui n’en utilisaient pas moins des voies classiques… Et malgré l’importance des moyens et du nombre des convoyeurs, voilà ce qui pouvait bien arriver. L’expert appréciait : une opération bien montée, une récupération sans failles et un profit juteux ; et ; il se laissa convaincre du sérieux des bandits… Cette organisation maffieuse si puissante avait décidé de contacter l’expert pour recourir à ses services, et, si la méthode d’approche était convenable, l’expert ne se faisait guère d’illusions sur leur volonté d’aboutir. Aussi il décida de se montrer coopératif, du moins en apparence. Les bandits projetaient de dévaliser une banque gouvernementale de métaux, aussi bien gardé que Fort Knox. Pour accomplir cet exploit, il fallait violer en sous-sol un coffre-fort géant, compartimenté, très sophistiqué, dans un environnement hyper-sécurisé. Mais ce n’était pas le seul problème… En cas d’acceptation du contrat, le chef maffieux s’était mis en tête de savoir qui se cachait derrière le masque de l’expert, s’il s’engageait à respecter son anonymat. Pourtant l’expert avait prévenu, avant même sa venue. Il resterait masqué, quelles que soient l’issue et les suites éventuelles : pas question de se laisser prendre en photo ! Evidemment le chef maffieux était du genre crampon et il s’arrangea, peu après leur rencontre dans la salle vidéo puante, pour proposer un dîner en tête à tête, en toute intimité et secret, personne n’étant mis dans la confidence selon lui. Ce n’était pas qu’un jeu mais cela amusait l’expert, cette insistance, malgré le danger ; car il voyait bien venir ce « gros pachyderme » qui était prévisible dans ses manœuvres, trop habitué au passage en force. Il y aurait forcément des gardes et des « soldats » dans tous les recoins et peut-être même un sous la table ! Mais alors qui serait le plus surpris s’il acceptait ? * Après avoir jouer des mandibules en tête à tête, le gros squale se laissa aller à une confidence, cigare au bec. Sa panse remplie réchauffait d’autres envies et il escomptait bien de sa découverte, en qui il avait cru son commensal… L’expert ou plutôt l’experte avait la figure d’un ange joli et heureusement que le squale avait mangé son homard avant ; puisque ce n’était qu’au seau à champagne qu’elle avait enlevé son masque, suivant l’arrangement convenu, et elle se masquait bien… - Je vous laisserai bien me faire d’autres révélations, ce soir et dans un endroit approprié, savez-vous ? Et même faire votre fortune avant pour peu que vous le désiriez… Sa moue était concupiscente. L’experte réprima une grimace : envie de manifester son dégoût. Elle ne se faisait aucune illusion sur le branle, mais flairait un bon coup à jouer. Elle avait de la marge et encore plus d’atouts que l’autre croyait, autant l’amadouer encore plus et voir en quoi consister la fortune promise, des fois que… L’experte, elle, ne se laissait jamais attendrir par la chère ni par la chair d’ailleurs, et elle ne buvait qu’avec modération… Elle eu un sourire ravageur, et il ne lui fallut pas beaucoup plus de sa panoplie féminine pour encourager l’autre, tout émoustillé, et le porter à croire qu’elle cédait à ses avances. Peu après ils allèrent dans sa chambre. Dans un remarquable jeu de composition dont on passera les détails, elle n’eut aucun mal à l’amener à découvert, s’exposant dans ses rêves de conquête passagère. Elle sembla prête à se prêter au désir, mais en gardant ses dessous…pour finalement lui donner d’un gant sa petite culotte en offrande. Le squale vibrant, le cœur rendu sur les lèvres en soufflant, la suivit à l’instant, la coucha pour s’embarquer entre ses cuisses et alors qu’il montait à l’assaut, sans même faire glisser la collerette de ses bas, elle le plaqua sous les draps, au fond du lit, pour lui faire mieux sentir sa peau, semblait-il. Mais alors qu’il avait la tête coincée sur le sexe de la belle, il ne se rendit pas compte qu’il libérait en même temps tout un arsenal disséminé dans les collerettes, en petites vésicules remplies d’un gaz inodore mais bien soporifique. Le hardi échoua ainsi à la porte du paradis ! Dès qu’elle le sentit inerte, après lui avoir tordu le nez, elle s’extirpa du lit prestement et repris un masque plus adéquat… Elle fouilla bien la chambre et trouva à faire. Elle refit le chef bandit de ses diamants planqués en coffre, ainsi que de quelques numéraires. Après tout, c’était mieux que de dévaliser une banque à métaux, hyper-gardée. L’histoire ne dit pas comment le chef des bandits se réveilla, enflé, avec une petite culotte sous le nez… Ce qui est sûr, c’est qu’elle n’est pas restée pour le voir et a bien veillé à disparaître, redoublant de précautions ! |