Du 15 novembre 1982



Le Péan des soupières à monnaie


J'ai des milliards de fonds, le cul de plomb et rond
Des cents aphones de petits porteurs à mes talons
Me suis fais baron et crois ferme aux étalons
Hon ! Ai renvoyé sentiments dans le siphon
Et si bon en haut du chapiteau un rebond
Que rehon se gonfle ballon et s'envole l'étron
!

Ils m'ont taillé jaquette les Jarry et les Monnier
Et je suis toujours l'arme au pied
Impassible aux jalousies de mes jeunes premiers
A l'art qui vitupère et picore mes deniers
Yé ! Omniprésent car visées de tout chantier
Yé ! Omnipotent car égo du monde entier
!

A me combattre, il ne sied d'écope ébréchée
Mais vingt pompes à l'unisson pour me recracher
Gagneraient ce duel épique à l'arrachée
Yé ! L'arche sociale n'est plus que sentine entachée
Maintes fois vilipendée mais jamais asséchée
Car je me suis fait pagne des concepts bien torchés
!

Je me chiffonne des saturnales en cellophane
J'élève mes tares au crêt des ambitions diaphanes
Que tu rues âne, je tendrais carotte et fil d'Ariane
Course à la manne, au trot en file de caravane
Sale-moi ! Je payerai des touches à ta sarbacane
Qui joue dans mes draps pour enfanter des fans
!

Oyez ! Cervelles amidonnées et repassées
Ce péan au bon valet qui m'a embrassée
Qui en égard aux lentilles, suffragettes brassées
Remplit mes seins creux pour se surpasser
Et vive ces gourmets qui des vertus détroussées
Ont fait des truies qui reniflent à truffe engoncée
!


© Jean-Jacques Rey, 1982