DON DE RIEN


Il y a quelque part un enfant seul au monde,
Dont le regard perdu te demande d'oser,
Toi, ce signe d'ailleurs qui court et vagabonde
Veut-il que son chemin puisse le sien croiser

Ami, ne tient qu'à toi de superbe alchimie,
D'animer dans ses yeux qui te sont inconnus,
L'assurance qu'il peut en tout début de vie,
Croire en des jours meilleurs, plus décents et moins nus.

Qu'importe dans l'instant le futur grand Partage,
C'est ici, maintenant, qu'un rien va le guérir,
Façon de récuser qu'à la fleur de cet âge,
Quelque fatalité le contraigne à mourir.

Cette fatalité, la réduit ton aumône,
Ouvre la cage et vois, l'oiseau prend son envol,
Un autre toi, conforme, et pas du tout un clone,
Dont l'immédiat besoin a la forme d'un bol.

Il est en ton pouvoir, une grande puissance,
Ton superflu devient pour lui l'essentiel,
Dans un fond de tiroir ? Son droit de renaissance
Attend, que tu l'envoies où s'étiole son ciel.

Si par tel abandon de ce qui ne nous prive,
Nous aiguisons nos sens et nous tendons la main,
Il devient que le cœur qui voit sur l'autre rive,
S'y découvre étonné : il y voit son prochain…


© Claude Gauthier